Palme d'Or Cannoise en 1990, excusez du peu, à l'époque où David Lynch faisait encore dans le relativement classique, Sailor et Lula c'était avant tout une belle histoire d'amuuuur...
C'était aussi l'époque où Nicolas Cage avait tout d'un très grand, où Laura Dern commençait à progresser (je ne l'ai pas aimée dans Blue Velvet), et où Willem Dafoe était au sommet de son art. Un road-movie en mode thriller où le cul se confondait d'une fascinante manière avec l'amour et où la violence des propos n'avait d'égale que celle des corps. Et pour s'en convaincre, il n'y a pas besoin d'aller chercher plus loin que la scène d'ouverture, lorsqu'une agression finit en bastonnage à mort sous les yeux d'une belle-mère impliquée tentant de se débarrasser de son beau-fils dans un langage peu glorieux... J'ai personnellement un petit faible pour l'extrait trash métal de cette intro qui reviendra régulièrement - la BO d'Angelo Badalamenti et consorts s'avérant magistrale, comme d'habitude.
Les débuts de nos deux amoureux font d'ailleurs un peu penser à ceux des deux psychopathes de Tueurs Nés, en plus subtils évidemment, mais ça c'est pas bien compliqué. Lula s'est faite violée par son oncle à l'âge de 13 ans, a perdu son père dans un incendie - base de toute l'histoire -, et sa mère jouant comme dans les soaps (l'éclairage en est aussi) a tout de la vieille pétasse, tandis que Sailor a perdu ses deux parents très jeune. Ainsi, en liberté conditionnelle, Sailor embarque Lula loin de sa mère, à bord d'une superbe décapotable et vêtu de sa cultissime veste en croco - celle qui révèle si bien toute sa personnalité.^^
Le fan d'Elvis ira plus tard interrompre un groupe de trash métal en plein concert pour lui prouver tout son amour. Mémorable. Et c'est aussi ça qui est beau dans ce film : leur amour fusionnel et leurs promesses fascinent. Il faut écouter comme Lula parle avec romantisme de la queue de Sailor. Si si ! Tout en sensualité, tout en lascivité, mais avec un peu plus de rythme par moments, rassurez-vous. Ils ne sont d'ailleurs pas les seuls à s'aimer : la belle-mère envoyant quelques tueurs à gage pour descendre Sailor, dont son amant, seul révélateur de sa possible dernière part d'humanité. Les autres incarneront des personnages hauts en couleurs, mais pas si importants que ça finalement...
Quant à Bobby Perrot (no spoils), le mal aux ratiches incarnées... Euh, le mal incarné aux ratiches dégueulasses, c'est un Willem Dafoe d'anthologie qui l'incarne. Son tête-à-tête avec Lula résume à lui seul un personnage aussi psychologue que débile, un personnage surréaliste. Tout comme sa destinée. Faut dire qu'il y a pas mal d'humour noir également : la radio en boucle morbide, le cousin Dal et ses sandwichs, ou encore l'accident de la route et les priorités d'une jeune femme...
Alors, malgré quelques petites longueurs aux 2/3, pas mal d'incrustations de plans des flammes de l'incendie en flash-back dont on se serait bien passés, Sailor et Lula mérite selon moi son statut de film indispensable. En témoigne son final surréaliste, et tellement mignon malgré le coeur sauvage de Sailor ! ^^