Lion d'argent à Venise, en lice pour l'Oscar du meilleur film international, représentant de la France, en attendant peut-être un César du meilleur film, Saint Omer, le premier long-métrage de Alice Diop, impressionne par sa densité, son intensité et sa puissance. Inspiré par le procès d'une infanticide en 2013, le film impose son point de vue, sur la monstruosité qui est tapie en chacun de nous, et sur la maternité qui n'est pas nécessairement une période d'épanouissement et de plénitude pour les femmes. Saint Omer est un choc, un film de prétoire d'emblée resserré sur les débats mais qui acquiert une autre dimension avec le personnage de l'écrivaine, bouleversée par ce quelle entend. Expliquer l'inconcevable et l'horreur, comme l'assassinat d'un enfant par sa propre mère, ressemble à une mission impossible mais Alice Diop filme avec dignité sensibilité et humanité avec des choix forts de narration, surfant sur la crête entre raison et folie. La cinéaste maîtrise totalement son récit, nous forçant sans doute à adopter sa vision des choses, ce qui pourra offusquer certains, mais se révèle en définitive une qualité d'un film qui exècre la neutralité. Avec le plaidoyer final de l'avocate de l'accusée, le film libère un fleuve d'émotion, avec un force dévastatrice. Dans une telle démonstration, il fallait des interprètes d'exception : Guslagie Malanda, Kayije Kagame, Valérie Dréville et Aurélia Petit laissent sans voix, dans des performances hors normes.