Les ingrédients choisis avec minutie pour réaliser Sale Temps à l’hôtel El Royale sont tous excellents. On a un bon casting (sauf Dakota Jonhson, qui reste en retrait), une excellent maîtrise technique notamment une magnifique photographie, un sens du décor aigu et une réalisation intéressante avec quelques très beaux plans et mouvement de caméras.
Et puis, annonçons la couleur, Drew Goddard s’inspire énormément de Tarantino et des frères Coen. Mais il faut le voir comme une réelle admiration, et éviter de se contenter d’un « c’est Tarantino en moins bien ». Après tout Quentin n’a pas le monopole du genre.
Mais le film souffre d’un gros défaut, le comble pour Drew Goddard, scénariste à succès qui signe là sa deuxième réalisation après un remarqué La cabane au fond des bois : c’est le scénario. Pour faire simple, Sale Temps à l’hôtel El Royale, c’est un mélange de plusieurs puzzles, et autant de personnages au passé et activités mystérieuses, dont certaines pièces ont été accrochées de force alors qu’elles ne correspondaient pas.
Je vais essayer de ne pas spoiler : On a le puzzle de John Hamm, qui ne limite finalement à être l’élément d’explication et l’élément déclencheur, mais ne va guère plus loin, le double puzzle de Jeff Bridges et Cynthia Erivo, qui fonctionne bien ensemble grâce à l’alchimie évidente de deux très bons acteurs, et se raccroche sans trop de souci à celui de Lewis Pullman. Et puis il reste le puzzle de Dakota Johnson, Cailee Spaeny et Chris Hemsworth, qui s’avère complètement bancal et ne colle absolument pas aux autres.
C’est à cause de cet aspect bancal de pièces rapportées que la mayonnaise ne prend pas.
Drew Goddard a cependant d’excellentes idées, et si certaines scènes tombent à plat, d’autres sont parfaitement surprenantes.
On cite tout de suite le coup de la bouteille, filmé ingénieusement, où l’évocation de la guerre du Vietnam, qui donne toute sa profondeur et toute sa justification au rôle de Miles.
L’hôtel en lui-même est un bijou de décor, un personnage à part entière, dont tous les détails ont été pensé avec minutie. La bande-son a également été choisie avec attention, jusqu’au morceau de rupture écouté lors de l’apparition de Billy Lee. Parlons-en également, Chris Hemsworth fait de son côté de l’auto-dérision avec son personnage : lui qu’on a souvent réduit à son physique, annonce la couleur tout de suite en se baladant torse nu en permanence, comme pour dire « oui, j’ai un corps, le voilà, maintenant on passe aux choses sérieuses ? ».
En conclusion, si le film est loin d’être parfait, avec un scénario bancal et de nombreuses incohérences, il révèle un réalisateur enthousiaste et plein d’idées, avec une maîtrise technique évidente, qu’il faut compter parmi les grands à venir.