Croulant sous les dettes et subissant les conséquences de la guerre sur le marché mondial, Walt Disney va se retrouver avec un problème encore plus grave sur le dos, son propre studio commence à se retourner contre lui. Durant l'été 1941, Une partie importante des animateurs commence une grève de plusieurs semaines reprochant notamment à leur patron de ne pas avoir respecté ses promesses de paiement (entre autres bien sûr, les raisons de ces protestations restent assez floues encore aujourd'hui). C'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase.
Roy Disney, qui gère alors l'empire financier de Walt Disney Productions, pousse son frère à partir loin de Burbank pour s'éloigner des tensions qui règnent au sein de son personnel. L'occasion va être idéale pour partir dans le Sud puisque le gouvernement américain va demander à Walt Disney de participer à la défense des valeurs américaines en Amérique latine de peur que le nazisme ne se répande sur le continent.
Grâce à des aides financières et entouré de plusieurs animateurs pour son voyage ainsi qu'une caméra embarquée, Walt Disney s'envole vers l'Amérique du Sud où il compte continuer à produire des courts-métrages pour le cinéma, son studio ne devant pas montrer un signe de relâchement par crainte de s'éteindre alors qu'il vient juste de connaître la gloire quelques années plus tôt. L'inspiration va venir au fil de la visite.
4 courts-métrages vont finalement voir le jour après des arrêts au Chili, en Argentine et au Brésil que Walt Disney va décider de compiler en un seul film pour le sortir sur grand écran. Saludos Amigos devient le premier Classique Disney à mélanger images réelles et animation et pour une durée de seulement 42 minutes, nous rappelant à quel point cette sortie n'est qu'un moyen de gagner du temps en attendant de trouver la bonne idée pour un prochain grand film et surtout de renflouer les caisses.
Le spectateur lambda habitué aux Classiques avec une histoire concrète est alors désarçonné devant cette narration décousue. À part pour ses quelques jolis passages animés, seuls les fans suivant l'actualité Disney régulièrement (dont principalement les courts-métrages) arriveront à trouver un vrai intérêt à Saludos Amigos en-dehors de sa valeur historique. À la limite pourra-t-on apprécier la "confidence" des animateurs montrant avant même les courts-métrages comment ils en sont venus à créer tel personnage ou tel décor.
Lake Titica et El Gaucho Goofy sont des représentations parfaites de l'exploitation des cartoons centrés sur Donald et Dingo. L'un profite de la perte de patience habituelle du canard faisant tout son succès et l'autre s'inspire des "How to..." où Dingo est le pantin du narrateur devant éduquer son public. Pedro est assez mignon mais n'égale pas les cartoons "spéciaux" du même genre tandis que Aquarela Do Brasil vaut surtout le coup d'oeil pour l'apparition de José Carioca, personnage qui gagnera en popularité dans le monde de la bande dessinée.
Petit Disney sans prétention, Saludos Amigos rencontrera pourtant le succès grâce aux faibles coûts de production et les recettes importantes en Amérique latine, le portrait brossé du pays par les équipes étant très positif. Walt Disney est rassuré par cette petite expérience qui ne va pas s'arrêter là. D'autres films de ce genre sont à prévoir.