All of Us Strangers avait tout pour me plaire, sur le papier, mais, malgré quelques scènes assez jolies, je n'ai pas réussi à me défaire d'une impression d'ensemble assez désagréable. De ce film émane pour moi une sorte d'étrangeté poisseuse, que je ne crois pas voulue – bien qu'il propose une vision assez pessimiste, parfois volontairement dissonante.
Je n'ai pas été convaincue par la façon dont le film flirte entre réalité et fantasme. Ça m'a juste semblé bizarre, et cette sensation a fait écran aux autres émotions que j'aurais pu ressentir. Pour moi, ce film essaye de raconter deux histoires qui se raccordent mal. Les pistes y sont de plus en plus brouillées (à la façon d'un rêve dans un rêve dans un rêve, ce qui peut lasser) sans qu'il y ait de réelle intention derrière.
Si ce n'est d'aboutir à une représentation tragique, visuellement emphatique et un peu grossière, de la solitude éternelle de certains hommes – qui ne sont pas si minoritaires que cela, puisqu'ils forment sans le savoir des constellations entières ; mais qui demeureront séparés les uns des autres, comme les étoiles qui forment celles-ci.
Les éléments s'assemblent mal entre eux ; Andrew Scott joue très bien (tout comme Jamie Bell et Claire Foy) mais c'est comme si ce rôle n'était pas fait pour lui. Les dialogues sont très bruts : aucune richesse d'interprétation, aucune épaisseur ne s'y cachent. Une certaine tendresse parvient à transparaître par moments, mais le film n'embraye pas là-dessus et c'est dommage. Malgré ses effets de lumière et sa BO planante, qui peuvent sembler un peu artificiels à la longue, ce film manque cruellement, selon moi, de poésie, de subtilité et de pouvoir de suggestion.