Voilà un film qui va vous éprouver. Qui n’aura jamais aussi bien définit cette maxime : « nous sommes responsables de notre propre ennui ». Le film réinvente le cinéma narratif aussi bien par sa durée que par ses leviers scénaristiques. Malgré les 7h30, le film n’explique pas grand-chose. A nous de deviner certaines zones d’ombres de l’histoire (qui n’est pas complexe). Ce qui peut paraitre perturbant ayant l’habitude qu’un certain type de cinéma nous (sur)explique les choses. Et c’est là qu’intervient la durée permettant de faire fi de tous ses procédés narratifs. Les scènes sont faites en plusieurs plans séquences qui s’étirent dans le temps. Là encore pour questionner notre rapport à la narration même si je ne pense pas que Tarr et Laszlo Krasznahorkai (l’auteur du livre) ont fait ça sciemment. Le rapport sur la temporalité a cette avantage de poser une ambiance unique. Evidemment la photographie de Gabor Medvigy y est pour beaucoup. Ce noir et blanc charbonneux rendant bien compte de l’état des campagnes hongroises durant cette période. Car pour toutes personnes ayant soif de connaissance, il serait réducteur de parler du film uniquement pour sa durée et l’expérience qu’il propose. Il montre aussi cette pauvreté voir même cette campagne hongroise hors du temps comme étant resté dans une autre époque loin de la civilisation moderne. Ces visages burinés par des conditions rudes surlignent cet état de fait sans compter que ces personnages tous plus ou moins méprisables (même la petite fille symbole de la pureté). Il n’y a que le visage du personnage d’ Irimiás qui a des traits plus fins comparés aux autres. Il peut être considéré comme le satan du titre. Sous ses traits fins, il propose un pacte avec les villageois qui n’aboutira pas. Tarr nous questionne sur notre propre condition humaine. Malgré nos choix, nous sommes dans une boucle dont on ne peut sortir.
Un film par moment éprouvant tant il ne nous habitue pas à ce genre de processus mais ô combien marquant.
Le temps est relatif /20