Adaptation du recueil de nouvelles Scary Stories to Tell in the Dark, le film éponyme réussit ses propres objectifs tout en oubliant un élément important, l’originalité.
Halloween 1968, dans une petite ville américaine, un groupe de jeunes s’immiscent dans une maison hantée. Lorsque ceux-ci découvrent un livre de recueil d’histoires, ils se rendent compte que celles-ci prennent vie. Les créatures naissent des peurs de chaque individu, et il faudra les affronter pour survivre.
Tout était réuni pour assister à la naissance d’un chef d’œuvre de l’horreur. Produit par le talentueux Guillermo Del Toro (Le Labyrinthe de Pan, producteur de L’Orphelinat), réalisé par André Øvredal qui avait créé la sensation avec son The Jane Doe Identity et surtout un matériau originel ayant une certaine renommée, Scary Stories ne décolle pourtant pas.
S’inspirer d’un recueil de nouvelles, donc d’histoires indépendantes, pour créer un récit construit sur un mal dominant est de loin la plus mauvaise idée du film. Conséquence d’une fusion de contes effrayants publiés dans les années 80, les situations sont attendues, la surprise n’existe tout simplement pas et la comparaison avec d’autres productions récentes est assez frappante (Ça, Chair de poule, Stranger Things). Mauvais n’est alors pas le qualificatif qu’il faut en ressortir car Scary Stories réussit ce qu’il veut entreprendre.
Il faut comprendre que l’œuvre ne tente jamais de renouveler le genre, il s’agit simplement de créer une histoire horrifique avec un soupçon d’espièglerie où chaque action attendue ou anticipée se produit. Le spectateur assiste plus à un hommage de 111 minutes au cinéma d’horreur plutôt qu’à une œuvre inédite. Pas de prise de risque scénaristique, le film est cependant impeccable dans sa réalisation, sa musique et son rythme. Les actions s’enchaînent bien, les créatures sont absolument superbes et surtout fidèles. Le récit, quant à lui, se développe petit à petit laissant parfois le spectateur bien accroché à son siège. Du frisson, des sursauts et un peu de rire, le cahier des charges est validé. Les jeunes acteurs sont corrects même si Zoe Margaret Colletti, l’interprète de Stella, s’en sort un peu mieux que les autres. Ne reste plus que le sous-texte à analyser, plus intéressant.
La fin des années 60 n’est pas l’époque la plus surexploitée du genre, bien au contraire. Scary Stories propose au spectateur un retour en arrière qui va servir son propos, croire aux histoires. Le film est assez explicite, chaque génération vit avec son temps, ses croyances et sa technologie (le cylindre phonographique, meilleure idée du film). Le spectateur assiste alors à un choc générationnel qui, pour une fois, ne concerne pas les jeunes post 1980. Dans un aperçu plus large, le spectateur remarquera l’omniprésence de Richard Nixon et de la guerre du Vietnam. Une époque américaine encore en plein changement, en plein questionnement aussi, juste avant les élections présidentielles de 1969. Nos personnages vivent encore dans une société où l’on croit aux histoires, aux dires, où toute information n’est pas vérifiée, ni forcément vérifiable. L’un des dialogues résonnent encore bien après son visionnage, « Lorsque l’on répète plusieurs fois la même histoire, elle finit par prendre vie ». Les créatures provenant de peurs répétitives, Richard Nixon détesté par une partie de l’Amérique, la guerre du Vietnam impopulaire ; toutes ces histoires prennent alors vie.
Scary Stories explore une morale plus complexe et sombre que son propos initial, à savoir que seule la vérité peut contrer les histoires effrayantes. Dans une époque où fake news et désinformation font rage, l’œuvre arrive à toucher toutes les générations au travers de leur propre Histoire. De fausses guerres aux mensonges d’état, la vérité n’a jamais été aussi recherchée et puissante que lors de ces 50 dernières années.
Le long-métrage se révèle finalement plus riche qu’il en a l’air. Il n’arrivera cependant pas à se détacher de certains de ses prédécesseurs et malgré ses qualités techniques indéniables, ne pourra jamais s’imposer comme une réussite par son manque d’originalité dans sa forme.