Le sujet est presque un cliché dans le poliziottesco : pour donner à ses policiers les moyens de lutter contre de violentes organisations, l’État met à leur disposition une unité plus ou moins légale bénéficiant d’une plus grande latitude. En l’espèce, l’unité est ici presque double. En effet, si elle est dotée de calibres Magnum 38 (référence au titre original), elle est aussi composée d’hommes à moto. À la tête de cette unité, Marcel Bozzuffi est un commissaire en guerre contre un mafieux, le Marseillais. Ce dernier, pour se venger de la mort de son frère, a tué la femme du commissaire sous les yeux de son fils. Avec sa brigade spéciale, le voilà donc en quête de mettre la main sur celui qui, revenu à Turin, s’est mis à dynamiter de nombreux lieux publics. Si on comprend peu ses motivations (ce qui en fait, d’ailleurs, plus un gangster sanguinaire qu’un mafieux), le résultat illustre parfaitement le contexte des années de plomb. À ce titre, Massimo Dallamano a la main lourde pour dresser en même temps le portrait de cette ordure notoire et d’une société malade. Tuant à l’aveugle, aussi bien des femmes que des enfants lors de ces attentats, il peut aussi tuer de sang-froid la femme du commissaire ou kidnapper un enfant qui passe sur son chemin. Le résultat est forcément très sombre, la vengeance des deux hommes semblant sans limite, illustrant cette Italie sanglante. Le film ne prend pas de position politique en se retranchant derrière cette guerre entre la police et une association criminelle, mais le climat y est parfaitement rendu, ce qui est une des réussites du projet.
Pour sa dernière réalisation (il s’est tué à la fin du tournage dans un accident de voiture), Massimo Dallamano prouve une nouvelle fois tout son savoir-faire. À partir d’un script plutôt quelconque, il parvient en effet à transcender son sujet grâce à de nombreuses séquences montées avec énergie et à un véritable sens du suspense. Entre de nombreuses belles courses-poursuites aussi bien en voitures (dont une première avec une jolie Mustang) qu’en motos, et l’attente qui ouvre chaque dépôt d’une valise plastiquée dans un lieu public, le réalisateur prend le temps aussi de s’intéresser à ses personnages. Ainsi le duel à mort qui occupe les deux protagonistes principaux n’empêche pas la présence intéressante d’autres personnages, dont un féminin qui occupe un rôle pertinent et qui ne se contente pas de prendre des claques dans la figure (même si, bien entendu, elle en prend aussi). Les hommes du commissaire Vanni ont aussi droit à une certaine épaisseur, en tête le personnage joué par Riccardo Salvino dont l’engagement dans l’enquête égale au moins celle de son patron. En gangster implacable, Ivan Rassimov fait, comme toujours, excellente figure.
Rythmé par l’impeccable partition de Stelvio Cipriani, le film est vraiment bien maîtrisé. À défaut d’originalité, l’ensemble s’appuie sur d’excellentes valeurs sûres dans tous les domaines pour livrer un polar, certes peu innovant, mais d’une véritable efficacité. Les scènes d’action sont un vrai modèle du genre avec de très belles cascades et l’intrigue n’est jamais confuse. Si le final peut décevoir, on tient là un titre solide servi par une distribution de qualité. On notera, pour le clin d’œil, la présence de Grace Jones interprétant une chanson dans un cabaret tapissé de rouge. À signaler qu’en 1977 fut tourné Équipe spéciale par Domenico Paolella sur un thème quasi similaire, toujours avec Marcel Bozzuffi.