Serial Mother
6.9
Serial Mother

Film de John Waters (1994)

Dans ce film tiré d'une histoire vraie, Beverly Sutphin est une mère aimante, une épouse dévouée et comblée, une citoyenne modèle qui trie ses ordures et offre un cake au fruits au prof de maths de son fils, une petite rasade aux éboueurs et qui aime observer les oiseaux le dimanche matin. En gros, une femme tout à fait charmante. A ce petit détail près qu'elle passe ses journées à passer des coups de fil anonymes à sa voisine en la traitant de "Pussy face" (je cite) et qu'elle trucide quiconque manquera de civisme ou de respect envers sa famille. Et que tout ceci est une gigantesque farce concoctée par John Waters.

Bien qu'ayant sérieusement mis de l'eau dans son vin depuis ses débuts trashs et underground, John Waters s'amuse comme un petit fou avec sa vision du téléfilm du dimanche soir forcément tiré de faits réels. Il nous offre un tableau décalé et peu flatteur d'une Amérique hypocrite et bienpensante, dégommant au passage l'église, le puritanisme, le système judiciaire, les banlieues proprettes, les institutions en tous genres, la récupération médiatique, le cinéma familial, la fascination du pays pour ses tueurs en série, l'insensibilité progressive des plus jeunes face à la violence, bref, tout ce qui tombe sous la main de Waters passe au mixeur.

Et le plus étonnant, c'est que le discours de Waters, bien que facile, passe comme une lettre à la poste et ne tombe jamais dans le nauséabond, le cinéaste faisant preuve d'un amour bienveillant envers chacun des ses personnages, qu'ils regardent "Annie" sans rembobiner la VHS, qu'ils portent du blanc après le Labor Day ou bien qu'ils soient tout simplement cons, le tout étant de toute façon à prendre au millième degré.

Drôle et gentiment irrévérencieux, "Serial Mother" permet surtout à Kathleen Turner de faire des étincelles, absolument hallucinante en mère modèle bloquée dans les 50's et fascinée par le massacre de masse. La comédienne, constamment sur le fil, est tout à tour angélique, flippante, et même carrément attachante, épaulée par d'excellents seconds rôles menés par un Sam Waterston excellent en époux dépassé par les évènements.

Parfaitement rythmé et devenu culte au fil des années, "Serial Mother" est un vrai film de sale gosse, une satire frappadingue d'une Amérique réac exécutant des innocents à la pelle, pointant du doigt tout ce qui est marginal mais offrant paradoxalement une tribune aux pires sociopathes que la terre aie portée... à condition bien sûr qu'ils trient leurs ordures.

Créée

le 9 févr. 2015

Critique lue 2.6K fois

27 j'aime

Gand-Alf

Écrit par

Critique lue 2.6K fois

27

D'autres avis sur Serial Mother

Serial Mother
ClémentRL
8

Critique de Serial Mother par Clément en Marinière

John Waters est toujours aussi clair dans sa dissection de la classe moyenne : elle rend fou. Façonnée par la violence du quotidien, Beverly Sutphin, mère de famille dévouée, se retrouve prise de...

le 5 janv. 2015

7 j'aime

Serial Mother
Fatpooper
6

Portrait d'une maman modèle

J'aime bien John Waters, c'est un marrant. Le film est plutôt sympatoche ; les gags fonctionnent bien, on nage en plein surréalisme tout au long du film ; les situations sont drôles, bien trouvées,...

le 24 févr. 2015

6 j'aime

1

Serial Mother
Heurt
6

Elle va tuer la mama

Les banlieues pavillonnaires américaines sont des lieux paisibles dans lesquels règne la sérénité. Dans ces petites villes, tout le monde se connaît et se salue. Les femmes qui vivent dans ces...

le 23 mai 2024

4 j'aime

Du même critique

Gravity
Gand-Alf
9

Enter the void.

On ne va pas se mentir, "Gravity" n'est en aucun cas la petite révolution vendue par des pseudo-journalistes en quête désespérée de succès populaire et ne cherche de toute façon à aucun moment à...

le 27 oct. 2013

269 j'aime

36

Interstellar
Gand-Alf
9

Demande à la poussière.

Les comparaisons systématiques avec "2001" dès qu'un film se déroule dans l'espace ayant tendance à me pomper l'ozone, je ne citerais à aucun moment l'oeuvre intouchable de Stanley Kubrick, la...

le 16 nov. 2014

250 j'aime

14

Mad Max - Fury Road
Gand-Alf
10

De bruit et de fureur.

Il y a maintenant trente six ans, George Miller apportait un sacré vent de fraîcheur au sein de la série B avec une production aussi modeste que fracassante. Peu après, adoubé par Hollywood, le...

le 17 mai 2015

212 j'aime

20