Shame
Encore une illustration de la démarche mercantile et racoleuse des distributeurs français, qui ont présenté ce film plutôt sérieux sur le thème de l'addiction (sexuelle, mais pas seulement) comme une...
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le 22 mars 2019
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Encore une illustration de la démarche mercantile et racoleuse des distributeurs français, qui ont présenté ce film plutôt sérieux sur le thème de l'addiction (sexuelle, mais pas seulement) comme une comédie romantique graveleuse, titrée fièrement "Sex therapy". "Ils adorent ça, ils ne pensent qu'à ça", proclame la jaquette avec gourmandise, au dessus des visages rieurs de Mark Ruffalo et Gwyneth Paltrow.
En fait, si l'on se trouve effectivement dans le registre de la comédie (douce-amère, en l'occurrence), le sujet est traité tout à fait sérieusement, loin des potacheries promises, et c'est évidemment tant mieux. Et "Thanks for sharing" est en réalité un film choral dont chaque protagoniste illustre un cas de figure de l'addiction, selon son âge, son sexe et son degré de guérison - le cas de Ruffalo et Paltrow n'étant qu'un exemple parmi d'autres.
Ainsi, les deux véritables héros du film sont (à mes yeux) Tim Robbins et Josh Gad, qui bénéficient à la fois d'une écriture soignée et d'une interprétation de premier ordre.
On croit sans problème au personnage de Robbins, une grande gueule revenue de toutes les addictions, présence massive et dominante aux réunions de goupe, toujours disponibles pour ses filleuls, bien davantage que pour son propre fils, lui-même toxicomane...
D'autre part, le jeune Josh Gad (sorte de Jonah Hill méditerranéen) parvient à associer la drôlerie burlesque relative à son rôle de comic relief, et une certaine émotion liée à son drame personnel.
Car "Thanks for sharing" n'édulcore pas (trop) la situation glauque vécue par les sex addicts, n'hésitant pas à montrer par exemple Gad en train de "se frotter" dans le métro, ou Ruffalo rechuter dans les bras d'une prostituée. Le film montre bien aussi l'aspect polymorphe des addictions, avec un Robbins accro non seulement au sexe mais aussi à l'alcool.
On le voit, "Thanks for sharing" cumule assez d'atouts pour être une réussite dans son genre, même modeste, sorte de version légère et chorale du "Shame" de Steve McQueen.
Hélas, deux défauts gênants viennent assombrir le tableau, et relativiser la bonne tenue de l'ensemble.
D'abord, le film de Stuart Blumberg (complice de longue date d'Edward Norton, ici producteur) a du mal à tenir la distance. Le réalisateur aurait du choisir d'emballer le tout en 1H30 générique compris, au lieu de quoi il décide de rallonger la sauce d'un gros quart d'heure, qui nuit clairement au rythme général.
Ensuite, pour un spectateur européen, il faut subit la tartine idéologique habituelle et les valeurs américaines, à base de guérison en 12 étapes, de prières obligatoires, et de "on doit absolument tout se dire au sein d'un couple"... Et le seul personnage qui semblait s'en être sorti tout seul dans son coin, je vous le donne en mille, finit par rechuter.
C'est donc une impression mitigée au final, mais "Thanks for sharing" a le mérite de traiter son sujet à la fois avec application et légèreté, ce qui en fait un film tout à fait regardable, surtout si l'on s'intéresse au thème épineux des addictions, l'un des fléaux les plus répandus de notre société contemporaine.
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le 22 mars 2019
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