Après une trentaine de films japonais, suivis d'un reboot américain en 2014, la Toho décide à son tour de rebooter Godzilla en 2016. Cependant, n'attendez pas là un film catastrophe pensé pour rivaliser avec son concurrent outre-Pacifique. "Shin Godzilla" est d'une part réalisé par et pour les Japonais, avec un budget modeste (environ 8 millions de dollars). D'autre part, il s'agit davantage d'une satire politique que d'un film d'action !
En effet, l'ensemble démarre avec une secousse sur le littoral nippon. Alors que les cellules de crises se mettent place à coups de réunions en costard, les dirigeants découvrent avec effroi qu'un monstre envahit leur pays... S'en suivront des séries de séquences très bavardes où les officiels tentent de gérer une situation qui les dépasse totalement.
Un traitement inattendu pour le célèbre monstre, mais aussi pertinent qu'intéressant. Loin d'être ennuyeux, le long-métrage pointe du doigt l'inefficacité du système japonais. Les chaînes de décisions pyramidales et d'une longueur aberrante. La bureaucratie à tous les étages, les agences qui se marchent sur les pieds, l'ego et les calculs des politiciens. En prime, tout une réflexion sur le pays sous la botte des USA.
Ainsi qu'un parallèle osé et affiché avec l'accident nucléaire de Fukushima. Dans la situation qui dépasse les procédure et les hommes, ou la bureaucratie qui n'aide pas. Même le protagoniste, Yaguchi, aurait été calqué sur le directeur de Fukushima à l'époque de la catastrophe, un homme réputé pour son pragmatisme et son efficacité.
Tout ceci se veut très rythmé, avec la multitude de changements de situations qui viennent en permanence secouer des personnages anti-caricaturaux. La mise en scène volontairement froide et détachée amplifiant l'absurdité de la situation. Notamment avec ces multiples titres envahissant, expliquant en permanence les fonctions, lieux, et objets, submergeant délicieusement le spectateur d'informations, à l'instar des personnages du film !
Mais Hideaki Anno propose également quelques bonnes séquences de destruction, dont un souffle atomique qui prend aux tripes. Et un design original pour Godzilla, pas évident après plus de 50 ans et 30 films. Certains effets numériques laissent à désirer, mais on excusera ceci au vu du budget modeste.
Un très joli reboot, original et osé.