Première partie vraiment chouette, film sarcastique et qui tourne en dérision la gestion de la crise Godzilla. Hideaki Anno et Shinji Higuchi se moquent des bureaucrates. Les politiciens, dépassés, circulent d'une pièce à une autre, incapables de savoir où s'asseoir, le cul entre deux chaises, face à la crise qui leur tombe dessus. Incapacité aussi à communiquer : quand le protagoniste prend la parole, on lui demande à qui il s'adresse. Lorsque le PM prend la parole, il ment. Les informations remontent du terrain jusqu'au PM en respectant les échelons hiérarchiques par un jeu de bouche à oreille très amusant. Les photocopieurs et les tables tournent dans des pièces modulaires pour trouver une organisation flexible afin de permettre la sortie de crise, mais sans beaucoup de succès. Tout semble dérisoire, notamment aux yeux du protagoniste qui désespère que ses pairs ne parviennent à s'organiser. Pourtant "Tout le monde fait de son mieux", et c'est vrai. Les politiciens ont beau être ridicules, porter des uniformes trop grands pour eux et proférer des bêtises, Ils se démènent tous comme des beaux diables pour rassurer, protéger, évacuer les citoyens.
Le film ne s'enferme pas dans la carricature, et la deuxième partie du film montre comment toutes les parties de la société parviennent à agir de concert pour immobiliser la créature. Là, il s'agit d'exhiber les fiertés japonaises, de sortir comme un enfant les plus beaux joujoux de son coffre à jouet pour venir à bout du colosse. Cette tendance lego est accentuée par l'aspect maquette et diorama du film. Il y a des camions, des grues, des drones et même les trains, toutes les machines se coordonnent pour affronter Godzilla et éviter l'annihilation de Tokyo.
Cette deuxième partie m'a moins convaincu. Une fois Godzilla sorti des eaux, une nouvelle menace pointe : l'étranger, les USA. La solution américaine, évidemment radicale, est subie comme une humiliation. Et c'est bien le sursaut patriotique qui semble ouvrir la voie. Je suis un peu déçu par ce final. Toute la première partie qui s'était si bien amusée à saborder la bureaucratie avec beaucoup d'inventivité redescend un peu comme un soufflet dans la seconde, comme si le film n'avait pas vraiment su comment se conclure.
Qu'en est-il de Godzilla ? J'ai trouvé qu'il avait une bonne tête, il sort du passé, rappel les bombardements de Hiroshima et Nagasaki tout en s'actualisant avec le scandale Fukushima. Un rappel qu'on ne contrôle pas le nucléaire.
La sortie du film, au moment du COVID, a grandement influencé le plaisir que j'ai eu à le regarder, même si plus que les insuffisances du gouvernement français vis à vis de la crise du covid, il s'agissait bien de filmer, pour Hideaki Anno et Shinji Higuchi, les blessures de Fukushima.