Ce chef d’œuvre de Kubrick est le premier film du réalisateur que j’ai visionné. Il me paraissait meilleur dans mon souvenir, même si je n'en gardais pas une image précise.
Je vais être honnête, j’ai recherché sur SensCritique des avis négatifs en accord avec mon ressenti, car je me suis demandé si j’étais le seul à trouver le film largement surestimé, et j’ai été heureux de trouver les défauts que je lui reprochais énumérés si souvent par d’autre que moi. Je ne suis donc pas seul au monde à ne pas être convaincu par cette adaptation…
Je dois préciser que je suis très friand des premiers romans de Stephen King (ceci explique peut-être cela), je m’étais donné comme mission de tous les lires, mais j’ai abandonné au milieu de sa période des années 1990, notamment avec le pavé Insomnie, qui m’a franchement dégouté de l’auteur. Tout ça pour dire que mes romans préférés sont les premiers, Shining en tête aux côtés de Le Fléau et Misery. La comparaison avec le film est donc parfaitement automatique, et le moins que je puisse dire, c’est que le film n’est pas à la hauteur du monument littéraire, malgré le talent indéniable du réalisateur.
Alors, oui, la photographie, la réalisation, les travellings et tout le tralala techniques sont remarquables, et autant dire qu’il s’agit du point fort du spectacle, mais en ce qui concerne l’intrigue, l’histoire de King a malheureusement était malmené par des raccourcis absurdes et des pirouettes ridicules (le cimetière indien sur lequel est supposé être construit l’hôtel est l’un des meilleurs exemples de ses facilités scénaristiques).
Je trouve aussi que les personnages sont dénués de toute profondeur. Jack nous apparait dès le début du film comme déjà un peu fou sur les bords, c’est un non-sens absolu et un désaveu de l’œuvre originel, lorsqu’on sait que c’est justement l’hôtel qui est censé lui faire péter les plombs. Je trouve que c’est un véritable problème, car on ne voit pas vraiment le personnage changé de comportement. Sa folie devient juste un peu plus intense au fil des minutes, là où j’aurais aimé voir un homme ordinaire sombrer dans une paranoïa inattendue. Le jeune garçon qui parle à son petit doigt voudrait créer le malaise, mais en réalité il a juste l’air complètement idiot. Quant à Wendy, on en parle ? Victime de cette vision sexiste qu’a le cinéma américain des années 70 et 80 sur les femmes, la pauvre épouse de Jack, qui dans le livre est décrite comme une victime combative, se retrouve ici décrite comme une pauvre âme en peine, une plante verte idiote réduite à la soumission. Que c’est mauvais !
La musique m’a pris la tête. Je le dis franchement. Il y a des sortes d’envolés, des moments de tension dans l’ambiance sonore qui ne sont jamais justifiés par ce qu’on voit à l’écran. Une méthode banale appréciée du cinéma d'horreur, mais qui personnellement me saoule. La musique m’a même fait sursauter alors que Jack levait seulement un bras derrière sa machine à écrire. Quelle farce !
Le rythme, qui s’inscrit merveilleusement dans le genre du Thriller, est très intéressant, même si on regrette un gros manque d’action, et surtout une présence trop rare d’événements paranormaux. Certaines intrigues ne sont pas bouclées. Dick raconte à Danny lorsqu'il le rencontre que le Shinning lui permet de communiquer par télépathie, mais l'histoire ne développe jamais ce phénomène, alors que dans le livre c'est justement le Shinnig qui alerte Dick de la menace qui pèse sur l'enfant (là où le film préfère justifier son déplacement par l'absence de signal radio). Quel était donc l'intérêt de présenter le Shining s'il ne sert pas l'intrigue, on se le demande? Aussi le titre du film devient affreusement dérisoire. On ne pourra pas dire non plus que l'oeuvre est très impressionnante, en réalité la classification Epouvante-Horreur pourrait même être franchement requalifiée de Fantastique. L’intention n’est pas de faire peur, mais de créer le malaise. Un malaise bien léger qui nous laissera sur notre faim.
Les acteurs sont géniaux, même Shelley Duvall qui se démène comme elle peut pour donner un peu de consistances subtiles à son rôle dénué d’expression (si l’on excepte l’effroi). Jack Nicholson est sublime. Il porte le film.
Au final, je ne suis pas vraiment convaincu par cette adaptation qui manque d’énergie et qui ne respecte pas tout à fait l’œuvre de Stephen King. C’est bien dommage. Je ne partage pas l’enthousiasme général, même si je dois admettre que je ne me suis jamais ennuyé, et que le résultat reste quoi que j’en dise particulièrement et affreusement divertissant.