Dès les premières scènes, John Cameron Mitchell n'élude rien d'un érotisme complètement décomplexé : un homme, très souple visiblement, se suce et s’éjacule au visage. Un couple hétéro s'amuse dans toutes les positions possibles. Une dominatrice s’occupe de son jeune client qui finit par juter sur un Pollock... Très intelligemment, ces scènes, presque non érotiques, servent davantage à établir une "psychologie" (par le sexe) des personnages qu’à simplement exhiber des bites et des paires de fesses pour choquer à tout va. Le soir venu, James, Jamie, Sofia, Severin et les autres se retrouvent au Shortbus, club underground où la parole est aussi essentielle, aussi vitale que l’expression entière du corps. On chante, on se confie, on refait le monde, on baise surtout, à deux ou à plusieurs, des hommes, des femmes, des vieux, des jeunes, des trans, des homos, des lesbiennes, des bi…

Le Shortbus, c’est une petite bulle de liberté dans une Amérique post-11 septembre gangrenée par la peur de tout, y compris celle du sexe et de l’amour. Davantage qu'un esprit libertaire et contestataire joyeusement revendiqué à l’écran (une séance de vibro débridée, l’hymne américain chanté au fin fond d'un anus…), Shortbus évoque ce mal-être général d’aujourd’hui qu’est celui de ne pas trouver sa place (la sienne ou par rapport à l’autre), celui qui nous fait douter, nous fait nous demander ce qu’il peut y avoir de plus important chez l’autre, sa couleur de peau ou son humanité, sa religion ou sa tolérance, sa capacité à faire jouir ou sa façon d'aimer. Fantaisiste, pudique malgré son effronterie, le film, servi par une bande de comédiens remarquables, est une pause euphorique et débridée dans la banalité du quotidien, du sexe virtuel et du prêt-à-penser.
mymp
8
Écrit par

Créée

le 6 nov. 2013

Critique lue 995 fois

10 j'aime

mymp

Écrit par

Critique lue 995 fois

10

D'autres avis sur Shortbus

Shortbus
Galaad
3

Critique de Shortbus par Galaad

Si votre emploi du temps ne vous permet pas de laisser filer inutilement 1h30 mais que vous désirez tout de même vous faire une idée sur ce Shortbus,, alors visionnez simplement la scène d'ouverture,...

le 27 oct. 2010

22 j'aime

3

Shortbus
Velvetman
8

Les démons de minuit

Le cadre libérateur qu’offre Shortbus est à la fois euphorisant, et dévasté par la quête existentielle qu’entreprend tout un chacun, au travers de cette jeunesse déjà adulte, voire ces « adulescents...

le 20 juil. 2014

19 j'aime

Shortbus
RobertJohnson
7

"They're eating asses and sucking cocks,and then they show at the buffet and say they're vegan"

Auriez-vous pu imaginer voir un jour dans un film (ou dans la vraie vie, d'ailleurs) un type chanter l'hymne américain dans un anus pendant que son "collègue" se sert d'un pénis en érection comme...

le 11 déc. 2013

16 j'aime

Du même critique

Moonlight
mymp
8

Va, vis et deviens

Au clair de lune, les garçons noirs paraissent bleu, et dans les nuits orange aussi, quand ils marchent ou quand ils s’embrassent. C’est de là que vient, de là que bat le cœur de Moonlight, dans le...

Par

le 18 janv. 2017

182 j'aime

3

Gravity
mymp
4

En quête d'(h)auteur

Un jour c’est promis, j’arrêterai de me faire avoir par ces films ultra attendus qui vous promettent du rêve pour finalement vous ramener plus bas que terre. Il ne s’agit pas ici de nier ou de...

Par

le 19 oct. 2013

180 j'aime

43

Seul sur Mars
mymp
5

Mars arnacks!

En fait, tu croyais Matt Damon perdu sur une planète inconnue au milieu d’un trou noir (Interstellar) avec Sandra Bullock qui hyperventile et lui chante des berceuses, la conne. Mais non, t’as tout...

Par

le 11 oct. 2015

162 j'aime

25