Las Vegas (et Hollywood !!!), ton univers impitoyable !!!

Bide commercial lors de sa sortie en salles, défoncé comme c'est pas permis par les critiques, noyé sous une petite pluie de Razzies (que Paul Verhoeven, parce que c'est un des types les plus cools du monde, a été allé chercher lui-même !!!), carrière de l'actrice principale pulvérisée, considéré comme une bouse absolument infâme de chez infâme, puis ressuscité par le marché de la VHS, défendu bec et ongles par des noms comme ceux de Jacques Rivette, Jim Jarmusch et bien évidemment Quentin Tarantino, qui y voient une espèce de chef d'oeuvre incompris.

Alors bouse infâme de chez infâme ou chef d'oeuvre incompris ??? Ben pour moi, clairement entre les deux...

Paul Verhoeven a réalisé une oeuvre qui ne peut pas laisser indifférent. C'est une espèce de chose rendue fascinante, qu'on aime ou qu'on déteste, par son jusqu'au-boutisme absolu dans la vulgarité, le mauvais goût, ne s'autorisant pas la moindre limite. Ce film, suivant une espèce de trame très vaguement inspirée du Eve de Mankiewicz, montre le rêve américain, à base ici de Las Vegas, dans son côté le plus crade, le plus sordide, le plus répugnant. Rêve américain guidé uniquement par deux choses, le sexe et l'argent. C'est tellement lourd, c'est tellement outrancier que ça en devient hypnotique.

La principale victime de l'affaire, Elizabeth Berkley, a eu un destin complètement injuste à cause de ce film. Elle a été victime de cette chose méprisable appelée slut-shaming, qui visiblement n'a pas attendu l'heure d'Internet pour pointer son nez, pour les mêmes raisons qui font que j'ai fortement apprécié son interprétation. Elle se donne à fond physiquement (certaines de ses performances dans ce domaine sont impressionnantes !!!) et personnellement ; à l'image du film, elle ne recule devant rien, ne se donne aucune limite. Elle est en symbiose totale avec cette outrance, cette vulgarité, ce mauvais goût. On notera aussi que son personnage n'est pas du tout une oie blanche, étant même par son côté badass féministe. Je trouve franchement triste qu'elle ait vu sa carrière s'effondrer à cause de ce rôle.

Là, je viens d'exposer pourquoi Showgirls n'est pas pour moi une bouse et les raisons qui font que j'ai trouvé sa vision digne d'intérêt. Mais bon, il faut être lucide dans l'autre sens aussi, ce n'est pas du tout un chef d'oeuvre incompris.

C'est pratiquement juste de l'étalage de chair, de crasse, avec des éléments très intéressants que j'ai exposés précédemment, mais pratiquement tout de même juste de l'étalage. Il ne faut pas chercher la moindre cohérence scénaristique, il n'y en a pas, on a l'impression qu'atteindre le sommet consiste juste pousser une concurrente dans les escaliers au bon moment; et c'est encore moins la peine de chercher la moindre cohérence psychologique, c'est bidon de ce côté-là car il n'y a aucun personnage qui soit creusé le moins du monde. C'est simplement de la gratuité dans l'étalage. Mais paradoxalement, je trouve que même les énormes faiblesses du truc rendent l'ensemble intéressant.

Ma lucidité me fait pleinement voir les énormes défauts du machin, que c'est clairement un des films les plus faibles de Paul Verhoeven, mais en même temps je ne peux pas m'empêcher d'être captivé par tout ça. Il y a un je-ne-sais-quoi d'inexplicable... peut-être l'outrance, juste l'outrance...