Shutter Island est un thriller psychologique alambiqué aussi visuellement que scénaristiquement. Baladant le spectateur entre descente dans la folie et théorie du complot, le film appuie son propos à coups de grosses ficelles visuelles. L'île, sens falaises et ses bâtiments sont très bien utilisés pour instiller une ambiance paranoïaque et dérangeante, mais je regrette à la longue les couleurs trop saturés des hallucinations ou les grands éblouissements d'éclairs. La surenchère de ces effets fatigue.
Surenchère, c'est également ainsi qu'on peut qualifier le jeu d'acteurs. Si certaines scènes sont émotionnellement très fortes, d'autres sont beaucoup trop appuyées et les personnages perdent en crédibilité.
Malgré ça on passe un bon moment devant Shutter Island. Si le film n'est pas toujours subtil, il est efficace et aborde une vraie question métaphysique : vaut-il mieux vivre en monstre que mourir en honnête homme ? Est-ce nous qui sommes fou ou le monde qui l'est devenu ? Di Caprio incarne une génération pessimiste, traumatisée par la Seconde Guerre Mondiale et ses horreurs, et dont le monde bascule. Son éducation, sa manière d'appréhender le monde, la confiance qu'il a en ce dernier, et la place qu'il devait avoir dans son foyer sont remises en question. Ces questionnements sont valables quelle que soit la fin du film selon vous, ce qui est une vrai force. Si ce n'est pas son meilleur film, Scorsese arrive au moins à maintenir la double cohérence de son récit jusqu'au bout.