Autant le dire de suite, si vous craignez les ambiances confinées et étouffantes d’un huis-clos, « Sieranevada » vous en donnera très largement pour votre phobie ! Toute l’action du film se passe, à l’exception de deux ou trois aérations, dans un appartement roumain assez chiche où s’entassent famille et amis pour la commémoration des quarante jours du décès du père.
Après une séquence d’ouverture des plus anodines (conversation superficielle d’un samedi de courses), Puiu nous enferme avec ce microcosme bouillonnant où femmes et hommes vont discuter, s’embrouiller, se détacher, s’affronter. Tout y passe, les valeurs du communisme, les théories du complot (l’action se passe quelques jours après l’attentat de Charlie Hebdo), la mort, l’adultère, la position sociale… Quelques répliques font mouche, on rit souvent, on s’agace aussi parfois. Le réalisateur replace son pays dans sa modernité quotidienne où les vieilles valeurs (religion, politique, nationalisme…) s’affrontent aux esprits plus libéraux (Lary, le personnage de la petite fille…). Ces scènes de la vie occidentale sont pour la moins banales et, sauf contexte historique, rien ne les séparent vraiment d’un repas de famille basique qui tourne vinaigre.
Si ce n’est l’idée de mise en scène, qui place le spectateur comme un voyeur, pivotant d’une pièce ou d’un groupe à l’autre. La caméra devient intrusive. Cette prouesse technique force le respect. Et l’on peut imaginer aisément les difficultés du tournage.
Toutefois, la durée de « Sieranevada » joue en sa défaveur. Car si comme Lary on s’amuse beaucoup dans un premier temps de cette hystérique ambiance, à force on finit par craquer et l’on ressent une impérieuse nécessité de prendre un bon bol d’air. D’autant que la dernière partie vire au grotesque et s’éternise à outrance, diminuant ce qui faisait jusque là, la vitalité du film. Certains spectateurs dans la salle n’y on pas résisté.
En matière de satire sociale, il faut savoir mesurer au plus juste la valeur et l’articulation générale du propos. Le verbiage est souvent l’apanage du ratage.