Elisabeth d’Autriche fascine. Dans la lignée de Corsage de Marie Kreutzer (2022) et après L’Impératrice sur Netflix, c’est au tour de Frauke Finsterwalder d’approcher le personnage d’un point adoptant le point de vue d’Irma Sztaray, sa femme de chambre (interprétée par Sandra Hüller - The Zone of Interest, Anatomie d’une Chute). Alors qu’on pourrait croire à un film d’époque sur le papier, la réalisatrice-scénariste déjoue toutes nos attentes et nous propose une oeuvre anachronique (vêtements modernes et exubérants pour l’époque) sur fond de musique rock, à la Sofia Coppola (Marie-Antoinette). Pendant 2 heures, le spectateur découvre la “vraie” Sissi, bien différente du mythe construit autour de la prestation de Romy Schneider : sont donc présentés ses manies, son obsession de l’image, de la minceur (elle impose ainsi à ses sujets une pratique intensive de la gym et restriction nutritionnelle) - ses troubles alimentaires, sa peur de vieillir, mais aussi, et plus étonnement, une dépendance à la drogue (nicotine). Le film s’intéresse au double jeu qu’elle entretient avec sa femme de chambre. Déconcertante de toxicité, Sissi se comporte de manière provocatrice et enfantine, “jouant” littéralement avec Irma. Les deux femmes se construisent pourtant ensemble, se révélant l’une à l’autre (jeux de miroir, attention portée sur les costumes), mais cette amitié et ce rapprochement ne sont qu’illusoires : nombreuses sont les références au conte (Belle au bois dormant avec la chevelure de Sissi, au Petit chaperon rouge avec sa robe) et au théâtre (costumes de pierrot, références à la commedia dell’arte, personnages hauts en couleur du cousin) traduisant ainsi l’immaturité du personnage principal (l’impératrice boit du lait de chèvre comme une enfant). Sissi joue de cette complicité, torture Irma et c’est par en cela que le film dérange : sous-couvert de séduction, l’oeuvre est complexe, violente, passionante et esthétiquement très belle : de quoi étonner et questionner. À voir.