Sans le savoir, Mario Bava avait l’année précédente posé avec « La ragazza che sapeva troppo » les premières bases du giallo. Ce genre à mi-chemin entre le polar et l’horreur, avec souvent de l’érotisme, et parfois du fantastique.
En 1964, il pondra celui qui est considéré comme le premier vrai giallo : « Sei donne per l’assassino ». Introduisant notamment les couleurs marquées, l’atmosphère cauchemardesque, les meurtres graphiques, ou l’image du tueur ganté en imperméable.
Le film ne sera pas un grand succès en salles. Mais il influencera de nombreux cinéastes, dont Dario Argento, qui sortira en 1970 le premier giallo à succès, « L’uccello dalle piume di cristallo ». Le genre deviendra ainsi très populaire dans les années 70, participant à la réhabilitation populaire du film de Mario Bava.
Car « Sei donne per l’assassino » est un petit bijou visuel, très osé pour son temps, et qui fait encore pleinement son effet. On s’intéresse à une série de meurtres au sein d’une maison de haute couture. Mario Bava privilégie l’atmosphère et les exécutions, devant une enquête policière au second plan (un autre trait caractéristique du genre).
Dès le générique le ton est donné. BO macabre, personnages tous crapuleux, intérieurs rococo, éclairages flashy cumulés à des couleurs très vives (dont ces mannequins en mousse écarlate, idée de génie !). On est réellement plongé dans un cauchemar, dont la mort semble être la seule échappatoire.
Mario Bava sait gérer son ambiance, et livre plusieurs séquences horrifiques très bien senties, qui culminent jusqu’à des exécutions violentes pour l’époque… parsemées d’érotisation des corps. Evidemment, on est en 1964, on n’est pas encore au niveau de gore et de nudité qui seront utilisés par le genre dans les 70’s.
Si les personnages sont assez peu développés, le scénario essaie surtout d’exposer leurs vices pour gonfler la liste des suspects (et des victimes !). Tandis que les « gueules » qui les incarnent leur donnent du corps.
« Sei donne per l’assassino » demeure ainsi un jalon du giallo, qui n’a pas perdu de son efficacité.