Voilà un film que l'on aurait adoré adorer. De façon pragmatique, on pourrait établir un tableau de notation impersonnel pour classifier et noter ses composantes : lumière, cadre, dialogues, musique, actorat et ainsi de suite. Il révélerait un film accompli, solide, mais c'est dans la rencontre entre tous ces éléments que le film peine à exister.
Pourtant, les qualités de Snow in Paradise occultent souvent ses faiblesses. Pour un interprète excessivement raide, caïd monolithique au bouc irréprochable, le reste du casting propose davantage de nuances. Pour un point de départ assez bête, car trop commode (le héros vole une partie de la drogue qu'il devait livrer, laissant son meilleur ami, présent lors du transport, porter le chapeau), le film développe ensuite plusieurs histoires intéressantes.
Et si chaque scène semble deux fois trop longue, leur contenu en lui-même n'est pas à blâmer. Mais les situations dépeintes semblent clouées au sol, conséquence d'une mise en scène léchée mais désincarnée car mettant tous ses enjeux au même niveau d'implication. De façon régulière, certains passages décollent, puis le film retombe dans sa torpeur. Avec un tel sujet, le résultat coupe le public de ce qui défile à l'écran, faute d'une tension qui excéderait le cadre d'une poignée de très bonnes scènes.
Chose d'autant plus regrettable tant Snow in Paradise se montre animé de bonnes intentions qui percent parfois sa chape de plomb. Rongé par la culpabilité, le héros entame un apprentissage aux croyances islamiques, d'abord par bravade (il entre dans une mosquée sans retirer ses chaussures), puis par désir de trouver une paix que ni la rue ni l'Église ne lui ont donné. Fil rouge du long-métrage, cet éveil à une religion nouvelle balaie également les amalgames faciles. Une passionnante sous-intrigue en soi, qui culmine en un long plan-séquence final sous forme de discrète prouesse physique.
Autre beau moment, un passage halluciné où éclatent (enfin) les émotions du héros, déambulation captée en quelques plans où des effets de flou et le corps du comédien en amorce composent la majorité des cadres. Le fond de Snow in Paradise est louable, riche de promesses, sa forme, certes insistante, a le mérite de tenter des choses; Mais la froideur qu'elle véhicule, si elle avait convenu à un court-métrage, achève de nous anesthésier.
Essai à transformer donc, ce premier long du monteur Andrew Hulme (l'excellent The American) cherchant à susciter autre chose que l'ennui poli qu'il provoque dès son premier tiers. Le film durant près de deux heures, son potentiel s'en trouve malheureusement noyé. Pour l'heure, reste de belles promesses dont il faudra se contenter.