Voyageons compagnons, de wagons en wagons !
Bon bon bon. Pour commencer j'aime beaucoup le travail de Bong Joon-ho, j'ai d'ailleurs aimé tous les films qu'il a réalisé jusqu'à présent et forcément lorsque j'ai ouï dire il y a de ça bientôt deux ans qu'il allait réaliser un film chez l'oncle Sam, j'ai forcément eu quelques sueurs froides. Et autant vous dire que ce fut bien pire le jour où j'ai vu la présence de Chris Evans au casting. Puis le premier trailer n'étant pas vraiment convaincant, ça n'a pas arrangé les choses. Mes amis qui ne connaissaient pas le réalisateur coréen s'attendaient à voir un énième film apocalyptique à la Roland Emmerich. Je leur avait alors dis que non, le film allait être autre chose qu'un block- BOUM BOUM- buster et que ce n'était pas du tout dans le genre de Monsieur Bong. L'attente fut longue mais nous y voilà, c'est parti pour deux heures de huit-clos au bord de cette machine infernale, de ce monstre de fer que rien n'arrête.
Snowpiercer c'est donc l'histoire d'un train qui fait le tour du monde avec à son bord le reste de l'humanité qui tente de survivre tant bien que mal à une nouvelle ère glacière provoquée par les méfaits de l'homme. On retrouve là le même point de départ que dans The Host, le rapport de l'homme avec la nature source de problèmes, l'homme qui se conduit himself à sa propre perte. C'est donc Chris Evans qui mène les queutards, la basse classe sociale qui se trouve en fond de train et vivant dans des conditions déplorables. Après 17 ans de misère et quelques révoltes plus tard, les queutards se lancent dans une nouvelle révolte avec pour but de rejoindre la tête du train et tuer son concepteur pour pouvoir prendre les commandes et vivre dans un monde plus juste. Le pitch est quand même assez sympa mais fortement sujet aux clichés et autres vaines braveries hollywoodiennes, heureusement le réalisateur coréen ne s'arrête pas à la simple lutte des classes et prends le temps de construire un film solide, un véritable melting-pot cinématographique pour un film qui au final n'est pas vraiment un film de SF, ni un film sociétal et politique. Snowpiercer c'est un peu tout ça, c'est l'oeuvre d'un réalisateur qui n'a pas perdu de son savoir faire et qui continue à nous surprendre par son talent.
Ici Bong Joon-ho fait ce qu'il sait faire et reprends les principaux éléments qui ont fait sa renommée, la noirceur d'un Mémories of Murder, l'humour incongrue et décalé d'un Barking Dogs Never Bite, le coté social et film populaire d'un The Host et la maîtrise dans la mise en scène d'un Mother. Un mélange des genres savoureux. Ainsi le film suit l'épopée des queutards allant de wagons en wagons dont chacun nous réserve de nombreuses surprises. Chaque wagon est un nouvel univers savamment construit et parfois assez décalés (Le wagon de la salle de cours). Un univers qui se réinvente donc sans cesse au fil de notre voyage qui nous mène de l'ombre à la lumière tandis que les enjeux s'assombrissent. Et si parfois on ne passe pas loin des quelques clichés - bon d'accord parfois ils sont biens présent les clichés - que l'on redoutait tant, Bong Joon-ho parvient à sauver les meubles par de belles ruptures de tons. Le travail d'écriture est d'ailleurs tantôt remarquable tantôt banal, le scénario bénéficie d'une belle vision globale et fourmille de bonnes idées mais les personnages sont quand à eux beaucoup plus lisses et légers bien qu’intéressants et attachants.
Visuellement l'ensemble est vraiment réussi avec une image particulièrement soignée et une mise en scène souvent juste et dépourvue d'artifices. Je garde en tête la fameuse scène bataille dans le wagon avec le travelling latéral suivant le personnage de Chris Evans un peu à la Old Boy, la façon dont il est isolé du reste mais pourtant si proche, le silence, la noirceur et la magnificence. En parlant de Chris Evans il faut dire que j'ai été agréablement surpris par sa performance, d'autant plus que j'avais pesté lorsque j'avais appris sa présence dans le casting. Un casting globalement réussi avec une Tilda Swinton et un John Hurt qui cabotinent un peu mais qui jouent bien leurs rôles. Mention spéciale à Song Kang-Ho, toujours aussi bon, qui apporte une sympathique touche de fraîcheur.
Au final il est quand même bien sympa ce Snowpiercer et même si ce n'est pas ce que Bong a fait de mieux, il arrive tout de même à éviter les principaux pièges d'un film hollywoodien. Je recommande. Dodeo approved.