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Dans un proche futur, l’homme a découvert une planète recouverte d’un océan huileux qui pourrait abriter la vie. Une station spatiale est bâtie, des dizaines de chercheurs s’emploient à entrer en communication. Hélas, le tout autre s’échappe. À l’instar des randonneurs extra-terrestres de Stalker, l’intelligence étrangère nous ignore. Seuls trois savants sont demeurés en orbite, leurs messages prennent une forme inquiétante. Kris Kelvin, un solide et solitaire psychologue, est envoyé sur place : à lui d’ordonner la fin de la mission.


Tarkovski adapte, à sa façon, un roman de Stanislas Lem. Il rajoute une première partie sur Terre. Kris observe et admire le lac, la forêt et l’isba familiale. Il ne prête qu’une attention distante à son père qui, âgé, redoute de mourir alors qu’il sera loin. La nature est magnifique, mais les humains sont rares. Un interminable et hypnotique plan séquence nous entraine sur une autoroute tokyoïte. Précédant l’envol et la découverte du vaisseau spatial, le macadam et le béton sonnent comme un adieu à la Terre.


Les amateurs de space-opera en seront pour leur frais. Tarkovski déteste la technologie. Il a obtenu, à sa grande surprise, un budget conséquent pour tourner une réplique au 2001 de Kubrik. Or, le satellite russe ne fait guère honneur aux ingénieurs soviétiques, le bâtiment est vétuste, des grappes de fils courent le long des coursives, les ordinateurs sont montés de travers. Seuls les salons vides offrent de magnifiques verreries, des meubles cirés, de riches bibliothèques et des tableaux de maître. La vie s’est retirée dans les peintures de Bruegel.


Kris découvre que son ancien professeur s’est donné la mort et se trouve confronté à Khari, sa femme, revenue des morts. Une ultime tentative de communication semble avoir réussi. Solaris génère des Visiteurs. Tirées de l’inconscient des scientifiques, ces entités prennent forme humaine, sont immortelles et incarnent leurs remords. Jadis, après une violente dispute, Khari s’est suicidée.


L’homme est si faible. Si on parle beaucoup dans Solaris, on s’écoute peu. Les savants, les parents et enfants, les amis n’échangent que des monologues croisés. L’homme est seul. Il déclare aspirer à l’amour. Qu’est-ce que l’amour, si ce n’est la rencontre avec l’autre ? Or, elle s’avère impossible, ces multitudes de rencontres avortées blessent, abiment et durcissent. Solaris apporte une réponse, une seconde chance. Comment vivre avec l’incarnation d’un amour disparu par sa propre faute ?


À l’instar du Professeur de Stalker, Sartaurius, un mécaniste froid, insiste pour irradier Solaris, il d’annihilera cette expérience morbide. Exterminons les Visiteurs et les remords s’évanouiront. Snaut incarne un humaniste hésitant, empathique et alcoolique, peut-être alcoolique car empathique.


Seule, la nouvelle Khari écoute et médite. Elle réfléchit, s’apitoie sur le sort de son double, puis sur celui de Kris qui se surprend à lui déclarer son amour : « jusqu'à aujourd'hui, l'humanité, la terre, était inaccessible à l'amour… Nous sommes si peu juste quelques milliards. Peut-être sommes-nous ici juste pour sentir que les hommes sont faits pour être aimés. » Il aime enfin. Il l’aime et ne la quittera plus.


Solaris offre l’opportunité d’un rachat, l’occasion d’un pardon. Khari prend conscience que Kris est prisonnier, la situation n’est pas tenable. En acceptant de se prêter à une nouvelle irradiation de Solaris, elle donne sa vie. Les Visiteurs ont disparu. Solaris a généré des iles... Nous apercevons Kris agenouillé aux pieds de son père... Le passé et le présent se bouillent, espace et temps vacillent... L’amour peut tout.

Créée

le 29 oct. 2018

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Step de Boisse

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