Soylent Green est une adaptation libre du roman "Make Room ! Make Room !" de Harry Harrison. C'est un classique des films "d'anticipation" et s'il a vieilli dans sa forme (ce qui n'est pas un défaut, mais nous en reparlerons plus tard) il n'a jamais été autant d'actualité.
Nous sommes en 2022, la biodiversité s'est effondrée, nous les Humains, avons rompu le cercle si fragile de l'écosystème et nous sommes les derniers survivants de ce génocide. L'avènement de l'ère industrielle nous a conduits à notre perte, nous avons détruit jusqu'au moindre animal, nous avons étouffé la quasi-totalité des plantes de notre planète. Voici le décor que plante "Soleil Vert". Un décor typique des 70's, où les Américains doutaient sur « l'American Way of Life ».
En quelques minutes, le film nous montre la conquête de l’Ouest, la construction des villes, la multiplication des moyens de transport, les usines, la pollution, la déforestation, etc. Il met le spectateur d’abord dans son monde pour l’amener ensuite dans la fiction. C’est là le premier parti pris du film, et ce pourquoi il a vieilli dans sa forme.
En effet, Richard Fleischer fait le choix ici d’alarmer le spectateur des 70’s en intégrant régulièrement un parallèle entre son monde, et la fiction qu’il regarde. Tout est fait pour rappeler que le monde décrit dans le film est le nôtre (nous spectateur). L’abus de mobiliers kitchs des années soixante-dix, les images de « l’Ancien-Monde », l’introduction, et même les images au générique. C’est un choix que je trouve culotté et qui fonctionne. On est happé par l’histoire, par la misère qui se dégage des rues, par le filtre vert et jaunâtre utilisé tout au long du film pour accentuer à la fois la chaleur, l’étouffement et la fatalité de la révélation finale (que je ne spoilerais pas ici).
C’est aussi une histoire d’amitié, qui donnera au film ses scènes les plus émouvantes. L’histoire entre le flic intègre joué par Charlton Heston, et un des derniers bibliothécaires joués par Edward G. Robinson. Je ne peux analyser avec vous toutes les scènes du film, même s’il y a beaucoup à dire. Je retiendrais pourtant les fameuses scènes du repas au bœuf, ainsi que celle du « foyer ».
Soylent Green oscille entre deux perspectives : une critique sociale et une nostalgie évocatrice du monde qui est encore le nôtre. Cependant, le film reste définitivement fataliste. L’humain ne fait que détruire, il n’y a aucun échappatoire, et même si la société dépeinte est d’une atrocité absolue, elle n’est pourtant pas encore arrivée au paroxysme de l’horreur. En témoignent les derniers mots de notre héros (que je ne spoilerais pas ici « bis »).
Enfin, je tenais à dire quelques mots sur la place des femmes dans le film. Il est intéressant de voir les femmes décrites comme « mobilier » (littéralement) d’un côté (où les plus chanceuses sont des bonnes à tout faire et des prostitués) et de l’autre avoir « l’échange », lieu du dernier espoir, où un conseil uniquement féminin tient les dernières vérités, connaissances et pouvoirs culturels.
Bref, j’en ai déjà beaucoup dit et il est temps de mettre fin à cette critique. Je ne saurais que vous conseiller de poser votre regard sur cette œuvre. Elle reste une œuvre d’anticipation extrêmement réussie qui porte à réflexion, où nombre de thèmes sont abordés (euthanasie, surconsommation, écologie, sociologie, économie, déontologie, etc.).
"Les gens ont toujours été pourris. C'est le monde qui était beau."