Sommersby, c’est le Martin Guerre de Warner Bros, ce qu’ils ont nié un moment dans l’espoir de ne pas avoir à payer les droits. C’est pourtant transparent très vite après le retour de Gere de sa guerre, située dans les USA esclavagistes histoire de dépayser un peu Foster (ce qui est très bien fait, & elle rend bien en costume d’époque).
Comme Amiel n’avait pas la quantité de pellicule allouée à l’original, il a pas mal précipité l’histoire dans une immédiateté générale qui sied mal aux grands espaces du Tennessee, quoique Gere arrive à remplir sa case de père de famille & de maître de maison par une écriture elliptique qui est assez bien vue du moment qu’on ne la remet pas trop en cause par la discordance que le raccourci produit avec l’accumulation soudaine d’évènements.
Non seulement tout doit se passer vite, mais tout doit se passer bien : l’œuvre présente une insistance curieuse à vouloir aller dans le bon sens des choses, pour ce qui se trouvera une longue mise en bouche trop fournie en optimisme vers un dénouement judiciaire bien ficelé qui n’a quant à lui de tort que sa brièveté. Amiel n’arrive pas à capter l’essence d’un drame dont le spectateur est laissé seul témoin, conscient mais impuissant devant une montée en puissance nécessaire mais qui n’est pas là.
C’est malheureux à dire, mais encore une fois seule Foster paraît réaliser ce dont le film a besoin, & elle le donne de toutes ses forces. Gere n’a pas plus de présence que dans ses collaborations avec Julia Roberts, se contentant d’être l’intermède romantique juste assez solide – un intermède qui dure tout le temps de l’histoire.
L’âme du Midwest prend bien dans le champ de tabac où évolue le casting & que l’équipe a fait pousser elle-même. Il n’y a rien de trop, juste un Bill Pullman sous-exploité & un esclavagisme amené sur le bout des doigts ; l’arrivée du juge noir choque l’audience, & c’est un moment brillant qui n’éclot pas du tout, étant dépourvu de l’écho qu’il méritait dans la cohabitation des deux groupes du temps de la guerre de Sécession.
Le film a le malheur de ne pas évoquer grand chose post-visionnage qu’une idylle bien fonctionnelle mais sans dimension dramatique, & une plantation souvent bien reconstituée & dotée d’une très belle ambiance, mais pauvre en occupation humaine. Peut-être la tentative aurait-elle eu du succès si les Américains avaient pour une fois assumé leur affection (par ailleurs tout à fait défendable) pour le remake transatlantique.
→ Quantième Art