Quel meilleur moyen de déployer pleinement la barbarie systémique du néo-libéralisme forcené dans lequel nous vivons (avec quelle marge de manœuvre ?) que d'ouvrir le film dans un noir profond où les voix-off nous plongent dans un entretien d'embauche.
Entretien d'embauche auquel nous sommes constamment préparés, accompagnés et où notre confiance se voit parfois remplacée par un état de sidération nous obligeant à accepter toutes les conditions d'une place à laquelle nous sommes censés aspirer comme un saint graal libérateur et pourvoyeur de tous les bienfaits du monde moderne. La tête baissé cet homme asservi son avenir et celui des siens à un algorithme qui dictera ses journées, son état d'âme et même ses pauses...
Ce système, cette manière de vivre et de se projeter dans le monde nous entoure, nous englobe, nous aspire ? Que reste t-il de notre libre arbitre quand l'altérité et l’interaction est déshumanisée au point de transformer nos rapports en échanges robotisés et mécanisés. Regardez ce hangar où s’affaire des humains chaque matin pour charger leur tournée quotidienne.
Où réside la pensée alternative ? Pouvons nous réellement croire que notre société actuelle est l'expression optimale de nos potentiels ? Nous nous sommes débarrassés d'une pensée critique du système actuel en offrant au capitalisme une victoire absolu et en considérant cette organisation comme étant quelque chose de figé et représentant la consécration de notre évolution. Les corps, les esprits et la nature sont broyés au profit de quel idéal ? Un idéal niant notre nature mortelle et impermanente. Regardez ce patron fier de câliner le boitier qui donne toutes les indications à ses livreurs-in(dé)pendants et de voir comment ces statistiques, qu'il obtient sur le dos d'autres humains, le place comme maître de la livraison asservissante et avilissante.
Alors que la pensée humaine a eu tendance à placer les êtres humains au centre de sa réflexion, serions nous aujourd'hui en train de glisser vers une société où la machine devient le centre et même le guide de nos manières d'agir.
Avons nous oublié que nous sommes les créateurs et que nous avons toujours le choix de choisir nos chaînes ?
En somme un film nécessaire qui pointe du doigt qu'une humanité réduite à une expression de survie n'est plus en capacité d'aspirer à une expression de création.