En 1941, Alfred Hitchcock n'était pas encore l'un des plus grands de tous les temps. Pour cause, malgré ses succès précédents et sa réputation montante, il n'avait pas encore réalisé Sueurs froides, Psychose, ou encore Fenêtre sur cour... Et pourtant, il était déjà facile de percevoir tout le génie du personnage à travers une mise en scène aussi personnalisée que maitrisée.
Disons le tout de suite, l'intérêt de ce film réside dans la capacité du Maitre à entretenir un doute dans la tête du spectateur et de Lina McLaidlaw (Joan Fontaine) sur le fait de savoir si son mari, Johnnie Aysgarth (Cary Grant), est un assassin et si, le cas échant, elle figurera parmi ses victimes.
Dès lors, et de bout en bout, le Maitre nous malmène dans tous les sens, nous inquiète puis nous rassure, avant de nous inquiéter à nouveau et ainsi faire monter la tension.
Sa plus grosse réussite? Donner l'illusion d'apporter une réponse finale à défaut de pouvoir apporter sa réponse.
En effet, controversée, la fin peut sembler décevante de par son côté "happy end" au détriment du final alternatif voulu par Hitchcock. Or, en y réfléchissant bien, cette fin peut en réalité s'analyser dans les deux sens laissant ainsi place à une fin ouverte et à des soupçons éternels conformément à l'esprit du scénario.
Récompensée par l'Oscar de la meilleur actrice, Joan Fontaine est pour beaucoup dans le succès du film, elle qui incarne à la perfection son rôle de femme amoureuse et dupée mais alerte face à un Cary Grant juste mais éclipsé dans ce qui est, sans le moindre soupçon possible, une énième réussite Hitchcockienne.