Portée par le tempo fracturé de Scary monsters and nice sprites de Skrillex, la première séquence donne le ton : le film ne sera pas sexy. Il sera trash et grotesque, pas aimable, de mauvais goût. Ceux qui sont venus se rincer l'œil n'en auront pas pour leur argent.

Construit de fulgurences juxtaposées, montées en parallèles, superposées, Spring breakers démonte les mythes américains les plus basiques et les remonte en boucle. Film de contrastes aux dialogues décalés, comme glissant sous les mains d'un DJ, déconstruit mais linéaire, brisé de gimmicks répétés à l'envi, Spring breakers expose de ses protagonistes les désirs primaires à assouvir, l'argent, le pouvoir, la défonce. Jusqu'au vide. Pas psychologique pour deux sous, sensitif et factuel, le nouveau film d'Harmony Korine fait le pari de tenir par la seule volonté de ses héroïnes. Sur une bande son vociférante, le récit initiatique jusqu'au-boutiste bouscule le genre en s'affranchissant de toute morale. "Amérique, regarde-toi" semble-t-il nous dire, "regardez-vous tous."

On n'est jamais loin du clip bling bling de rappeur, jamais loin non plus de l'expérimentation arty. Les figures du gangsta et des poulettes dépravées, sorties pêle mêle de l'inconscient collectif, alimentent jusqu'à plus soif la descente des quatre filles après leur rencontre avec Alien, sorte d'archétype lambda de la face obscure de l'american dream. La chute sera rude, ou ne sera pas.

On peut donc se laisser porter d'un bout à l'autre. On peut aussi décrocher de temps en temps, louper un virage, une descente, comme provisoirement éjecté des montagnes russes. On peut aussi se lasser.

Le film n'en demeure pas moins suffisamment puissant pour nous maintenir éveillé jusqu'au bout, nous réservant même quelques scènes marquantes, dont le hold-up de la première partie est la plus réussie. Ajoutons à cela un casting casse-cou au top, les quatre filles (dont deux évadées de chez Mickey), et surtout James Franco, qui réussit à se rendre aussi crapoteux qu'il est en général sexy (on vous avait prévenus). Il est, comme toujours, excellent.
pierreAfeu
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le 12 mars 2013

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pierreAfeu

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