Une saison en enfer
Est-ce par goût de la contradiction, Harmony, que tes films sont si discordants ? Ton dernier opus, comme d'habitude, grince de toute part. L'accord parfait ne t'intéresse pas, on dirait que tu...
Par
le 9 mars 2013
244 j'aime
74
Fils spirituel de Larry Clark, dont il a écrit les cultissimes Kids et Ken Park, Harmony Korine a souvent été associé à un cinéma indépendant excentrique et provocateur, de son étonnant premier long-métrage Gummo à son docu-fiction expérimental Trash Humper (summum de mauvais goût où l'on baisait des poubelles en chiant partout). Cependant, après une cure de désintox revigorante, notre hipster trash décide de se frotter à un projet bien plus grand que lui (et donc beaucoup plus cher que d'habitude), en partant observer ce gros moment de débauche adolescente qu'est le Spring Break.
Korine n'en perd pas pour autant sa personnalité si singulière. Bien au contraire, ses thèmes de prédilection sont toujours présents (le désenchantement d'une jeunesse livrée à elle-même, la quête de beauté, voire de poésie, au cœur de la misère ou de la violence...) et on lui découvre même un savoir-faire plastique hors-norme, proche de l'avant-gardisme d'un Malick ou d'un Godard sous acide.
Plus contemplatif et définitivement plus inventif qu'un teen movie comme Projet X, ce thriller sulfureux, dont certaines scènes relèvent véritablement de l'expérience sensorielle, se vit comme un shoot de drogue. Un scénario instinctif et à la narration éclatée fait la part belle à une réalisation ultra graphique et à des montages alternés complètement « what the fuck ». Korine filme une sorte d'extase, il varie les cadrages, les lumières et les temporalités, en ressassant sans arrêt les mêmes extraits et autres gimmicks sonores (des murmures, de gros bruitages de flingues pour passer d'une séquence à une autre...).
Une sorte de collage foutraque en somme, mais une claque esthétique indéniable, que l'on doit en partie à l'impressionnante direction photo de Benoît Debie. Connu pour ses collaborations audacieuses avec Gaspar Noé (Irréversible, Enter the Void et plus récemment Love), ce magicien de l'image s'est encore une fois bien lâché : Beaucoup de néons, d'éclairages fluos et un agencement presque scientifique de la couleur, qui fait sens dans absolument chaque plan du long-métrage (mention spéciale à ce sublime braquage en plan-séquence). Un bonheur pour les yeux qui au passage s'associe parfaitement à la musique planante de Cliff Martinez et Skrillex.
Côté casting, on ne cache pas notre plaisir (coupable) de voir ces starlettes issues de séries pour ados malmener ainsi leur image, aux côtés de madame Korine et d'un James Franco en roue libre, tout bonnement hallucinant dans un rôle (extrêmement caricatural) de rappeur gangsta aussi inquiétant qu’hilarant. Les cinq personnages principaux forment un gang particulièrement sexy, mais obsédé par un amercican dream à la Scarface, et surtout complètement abrutis par la société de consommation... Par ailleurs, en incluant diégétiquement deux de ses plus grands tubes dans la BO, le long-métrage souligne un parallèle tout à fait passionnant entre Britney Spears et ses héroïnes, comme pour évoquer la génération perdue dont elles font toutes partie.
Voilà donc tout l’intérêt de Spring Breakers, qui témoigne à la fois d'une fascination et d'une grande inquiétude pour cette jeunesse à la dérive, en alternant constamment (...et parfois avec humour) entre une euphorie décomplexée et une violence très « film noir ». Une sacrée expérience cinématographique en ce qui me concerne.
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Top 10 Films, Les meilleurs films de 2013, Les meilleurs films des années 2010, Bluraythèque et Les meilleurs films de Harmony Korine
Créée
le 18 juil. 2016
Critique lue 268 fois
2 j'aime
D'autres avis sur Spring Breakers
Est-ce par goût de la contradiction, Harmony, que tes films sont si discordants ? Ton dernier opus, comme d'habitude, grince de toute part. L'accord parfait ne t'intéresse pas, on dirait que tu...
Par
le 9 mars 2013
244 j'aime
74
Le film démarre comme un clip de MTV, avec de la musique merdique et la caméra qui tremble. Il n’y a pas de dialogue, juste des cons qui sautent à moitié à poil en buvant de la bière (yeaah on se...
le 16 mars 2013
162 j'aime
39
Si faire rouler des culs souillés par la bière et la sueur en 120 images secondes pendant une heure trente correspondait à l’image que je me faisais de la représentation du carpe diem contemporain,...
le 13 sept. 2013
140 j'aime
79
Du même critique
Objectivement, Juste la fin du monde est brillant à de nombreux niveaux. Quelle maîtrise, quelle inventivité ! Il n'y a pas à dire, tout semble chorégraphié au millimètre près. Pourtant, force est de...
Par
le 17 sept. 2016
25 j'aime
1
Alors que Brice de Nice premier du nom ne me laissais pas un excellent souvenir, le cinéaste James Huth et l'acteur oscarisé Jean Dujardin décident cette année de réanimer ce phénomène...
Par
le 21 oct. 2016
23 j'aime
2
Alors, que vaut finalement cette « palme du public et de la presse » ? Ne faisons pas durer le suspense plus longtemps : J'ai du mal à m'en remettre tant ma consternation fut grande. On en ressort...
Par
le 18 août 2016
18 j'aime
8