Pour les adeptes d'intensité émotionnelle...
« States of Grace » est un film sorti dans les salles françaises le vingt-trois avril dernier. Je vous avoue que je n’avais guetté son apparition sur les écrans pendant des jours et des jours. En effet, je n’ai découvert son existence qu’en naviguant sur le site Allociné pour regarder les nouveautés de la semaine. Dans un premier temps, c’est la valeur élevée des critiques à son égard qui m’a attiré. Que ce soit les professionnels ou le public, bon nombre de personnes semblaient être tombées sous le charme de de cet opus américain réalisé par Destin Cretton. Le haut de l’affiche était habité par la phrase suivante : « Elle va vous mettre dans tous vos états. » C’est une promesse ambitieuse mais difficile à tenir. J’ai néanmoins décide de tenter ma chance à l’aveugle. Je me suis assis dans mon fauteuil de cinéma sans avoir vu la bande annonce ni avoir lu un quelconque article à son propos.
Je vais néanmoins vous donner le résumé offert par Allociné pour que vous puissiez vous faire une première image de l’esprit du film : « Sensible et déterminée, Grace est à la tête d’un foyer pour adolescents en difficulté. Parmi les jeunes membres de son équipe, diversement expérimentés, la solidarité et le bon esprit sont de mise. Jusqu’à l’arrivée soudaine d’une fille tourmentée qui ignore les règles du centre et renvoie Grace à sa propre adolescence… pas si lointaine. »
L’histoire s’appuie sur des thématiques dures. La souffrance est au centre à l’origine de l’essentiel des rapports entre les protagonistes. En ce sens, le film ne s’adresse pas à un public jeune ou à des spectateurs sensibles devant la violence qu’elle soit verbale, physique ou sociale. Je conçois aisément que certaines personnes ne souhaitent pas se mettre en difficulté sur le plan émotionnel pour de telles raisons au cinéma. Si c’est votre cas, il faut passer votre chemin.
Le risque légitime de ce type de film est de tomber dans le pathos extrême. La souffrance et l’émotion sont deux ingrédients à manipuler avec précision et finesse. Cela peut autant donner un chef d’œuvre marquant qu’un produit horripilant de mièvreries et de « too much » irritants. La faible durée relative du film – cent minutes – me laisse croire que le réalisateur n’a pas l’intention de tomber dans des digressions pathétiques, caricaturales et politiquement correctes. En tout cas, je l’espérais.
La narration se présente comme une tranche de vie de ce foyer pour adolescents. Notre premier contact avec ses membres concerne l’arrivée d’un nouvel encadrant accueilli par ses nouveaux collègues. A travers une anecdote, les dialogues arrivent à nous offrir une présentation des lieux et de son fonctionnement. C’est assez subtil et efficace. Dès les premières minutes, j’ai été immergé dans le film. La curiosité de connaître le dénouement de l’événement raconté était une porte d’entrée toute tracée. Cette scène a lieu dans le jardin situé devant les bâtiments. Ce moment léger va être interrompu par une tentative d’évasion d’un des enfants. Cela marque le retour à la réalité. Ce n’est pas une colonie de vacances, loin s’en faut.
La présentation des locataires du foyer m’a beaucoup plu. On ne connaît pas leur pédigrée. On sait qu’ils sont là parce qu’ils ont eu de gros problèmes et que leur équilibre psychologique est au mieux instable. Ils sont en souffrance et bien souvent en danger. Néanmoins, bien souvent on ne sait pas précisément l’origine de leur situation ou la nature exacte de leurs pathologies ou de leurs détresses. Il n’y a pas de voyeurisme à ce niveau-là. Cela ne gêne à aucun moment. En effet, a-t-on besoin de connaître dans les moindres détails la vie de quelqu’un pour l’apprécier ou pour être sensible aux événements qu’il vit ou pour ressentir de l’empathie ou de l’affection à son égard ? Evidemment que non. « States of Grace » en est la preuve.
Le personnage central se prénomme Grace comme l’indique le titre. Elle dirige le foyer. Son personnage est attachant pour plein de raisons que je vous laisserai découvrir au gré de l’avancé de l’histoire. Ses relations avec ses collègues et avec les adolescents sont autant de points d’appui pour nous faire découvrir au fur et à mesure sa personnalité. Elle dégage à la fois une force et une fragilité qui la rend profondément touchante. On l’admire tout autant qu’on a envie de la protéger et de la rassurer. L’interprétation de Brie Larson est remarquable.
Mais le film ne s’arrête pas à son protagoniste principal. Tous les personnages sont bien écrits et participent à l’atmosphère intense du lieu qui les réunit. Qu’ils soient présents, secondaires ou en retrait, chacun amène son éco à la force dramatique que génère l’histoire. « States of Grace » est une expérience émotionnellement intense. Le travail d’écriture tant des scènes, du scénario que des dialogues est remarquable. Il permet à la salle de cinéma d’être envahie d’une atmosphère forte qui ne laisse pas indemne. J’ai très souvent été ému profondément et les larmes n’ont pas été rares.
Pour conclure, je ne peux que vous conseiller de découvrir ce film lors d’une prochaine diffusion à la télévision. Dans ce cas-là, blottissez-vous dans votre canapé, ne laissez allumée qu’une veilleuse et savourez la rencontre avec cette petite communauté. Elle ne vous laissera pas indifférente, soyez en sûr… Bon film…