Le site est de retour en ligne. Cependant, nous effectuons encore des tests et il est possible que le site soit instable durant les prochaines heures. 🙏

László Nemes présentait à Zürich Sunset, son deuxième film. Trois ans après la sensationnelle sublime traversée des enfers Le Fils de Saul (Grand Prix au Festival de Cannes), le cinéaste prouve à nouveau son talent inouï pour le maniement de la caméra embarquée dans un cadre cette fois-ci plus large que les camps de concentration: les quartiers huppés du Budapest des années 1910, les querelles familiales déchirant la ville, et ses relations avec sa voisine et rivale Vienne. Scènes de heurts, de nuit noire, de foule en transe: László Nemes plonge le regard au coeur de l’action avec une virtuosité sans nom, offrant au tout une foudre de tous les instants, au plus près des comédiens. Juli Jakab se prête merveilleusement au jeu de l’héritière solaire prise aux mains d’un monde d’hommes aristocrates, dans lequel personne ne lui reconnaît son statut; celle de la fille du plus grand chapelier du pays, dont l’entourage a été décimé dans de sombres histoires d’incendies et d’assassinats.


Dense, Sunset traverse les problématiques politiques de la Haute, les contestations de l’époque et se passionne pour l’histoire de son pays. En dépit d’une époque rarement retenue pour les oeuvres les plus trépidantes et rythmées, Nemes fait danser chaque parole. La caméra et les noeuds consécutifs du récit maintiennent captifs pendant 2h30, jusqu’à bloquer notre souffle, notamment au cours d’une scène terrible, glaçante, et dont on voudra vite s’échapper. De vrais moments de cinéma, lors desquels la technique et l’émotion fusionnent au firmament. Hélas moins rigoureux que son prédécesseur (la barre est haute, le film transperçait l’acier des trains au fer et à la lave), Sunset est une conception plus ambitieuse et épique, aux nombreuses subtilités qui suggèrent un second visionnage. Entamé sur une délicieuse carte postale peinte de Budapest et conclu sur un tournant sanglant de son histoire, le film est également une déclaration d’amour à la ville et à sa région, dont la culture est ici portée jusqu’aux plus acclamés des festivals.


Après deux réalisations diamétralement opposées, reste à voir quelle sera la troisième illumination de László Nemes. Quoi qu’il en soit, ses longs-métrages et ceux de Kornél Mundruczó (White God, La Lune de Jupiter) confirment la grande forme d’un cinéma hongrois qui palpite. Celui-ci délivre des fables sociales et intimes grandioses grâce à un sens de l’action et du mouvement miraculeux, parfois à se demander comment. Dès lors, aucune histoire ne peut être contée avec flamme; c’est là que Sunset réussit son pari haut la main.


— vu au ZFF 2018 | article complet disponible sur TheBergerie.net

Peachfuzz
7
Écrit par

Créée

le 6 oct. 2018

Critique lue 877 fois

4 j'aime

3 commentaires

Peachfuzz

Écrit par

Critique lue 877 fois

4
3

D'autres avis sur Sunset

Sunset
Cinématogrill
8

Derniers feux d’un âge d’or

Foudroyé sur place par Le fils de Saul, Grand prix du jury à Cannes puis Golden Globe et Oscar du meilleur film étranger, j’attendais Sunset avec un intérêt non feint même si je pensais naïvement que...

le 19 mars 2019

10 j'aime

1

Sunset
Toshiro
8

De l’amère moire du monde et d’une femme dans sa tourmente

Le fond et la forme, le scénario et l’esthétique, l’intelligible et les sensations. Plus d’un siècle d’histoire du cinéma et on en est toujours là, tenu par ce dualisme typiquement occidental...

le 15 mars 2020

8 j'aime

Du même critique

Licorice Pizza
Peachfuzz
9

Once Upon a Time in San Fernando

Dès les premiers plans de "Licorice Pizza", les contours d'Alana Haim, le golden haze californien, l'OST tonitruante et le bitume brûlant nous téléportent dans un des rares espaces-temps où l'espoir...

le 14 déc. 2021

30 j'aime

Roma
Peachfuzz
9

La vie, la vraie.

Absolument somptueux, le Roma d’Alfonso Cuarón aura survolé le dernier ZFF, voire même cette année en deux vastes heures d’un spectacle infiniment beau; celui de la vie. Le noir et blanc chatoyant du...

le 6 oct. 2018

25 j'aime

2

Wildlife : Une saison ardente
Peachfuzz
7

This is America.

Après nous avoir emballés au fil de ses performances d’acteur (Little Miss Sunshine, There Will Be Blood, Prisoners, Swiss Army Man), Paul Dano présentait son premier film à la Quinzaine des...

le 6 oct. 2018

18 j'aime