Face aux critiques et aux notes, curieusement positives et éloignées de mon ressenti, je me suis posé la question de pourquoi je n'ai pas particulièrement aimé ce Super Mario Bros. Movie. J'ai pourtant l'habitude d'être grandement en désaccord avec les avis exprimés sur de nombreux films populaires, le MCU en tête. Mais cet écart m'a grandement surpris sur ce film, qui semble plutôt apprécié, et pour qui la critique est semble-t-il assez indulgente. Et j'étais pourtant parti avec espoir étant donné la qualité du dernier Gardiens de la Galaxie, qui relève finalement plus du piratage d'un système que d'un véritable renouveau

Car oui, ce film a un grande qualité : son animation. Le savoir-faire d'Illumination n'est plus à prouver, et le foisonnement de l'image, bariolée et vivante, et la qualité des textures des personnages sont assez impressionnants. Les univers créés, notamment celui du Royaume Champignon, sont également intéressants et innovants, et démontrent une capacité de transposition de l'univers des jeux vidéos (auxquels je n'ai que peu joué) plutôt bien mûries et assez au point.

Mais malheureusement, les défauts du film dépassent grandement ses qualités. Entre un casting vocal (en VO) assez anecdotique, le traitement de certains personnages pris par dessus la jambe (Luigi et Donkey Kong en tête, réduits à deux caricatures peu flatteuses), et le classicisme paresseux de son scénario (Bowser est par ailleurs un méchant assez anecdotique, jamais impressionnant, jamais terrifiant, jamais drôle), Super Mario Bros présente tous les symptômes du cinéma de divertissement grand public hollywoodien de ces 10 dernières années.

Mais là où il pêche le plus, c'est sûrement dans la comparaison avec un film du même calibre sorti cette année : Donjons et Dragons. Si ce dernier est assez oubliable, il reste tout à fait honnête. Car il se suffit à lui-même. L'ensemble de son contenu est intradiégétique, et il m'a satisfait, même en tant que total béotien de l'univers. Au contraire, Super Mario Bros verse dans cette boursouflure post-moderne qui détruit le divertissement hollywoodien, le clin d'oeil extradiégique, jusqu'à en devenir une caricature.

Le premier symptôme est l'utilisation, jusqu'à en vomir de musiques "pop" tout à fait déconnectée du propos ou de l'univers du film. Dans ce film, c'est la présence inutile dans la BO du film du I Need a Hero de Bonnie Tyler ou du Take on Me de A-ha, chanson maintes fois remâchée et recrachées sans vergogne par l'industrie du divertissement, qui me débecte. Le seul intérêt est de faire vibrer une fibre nostalgique chez le public le plus âgé (ou le plus curieux de cultures du XX° siècle), en trayant la mamelle du retour en force des eighties dans la pop culture, comme passé idéal fantasmé. Ce qui est passablement gerbant en connaissant la réalité de cette époque (Reagan, Thatcher, fin des 30 Glorieuses, montée du racisme,etc...)

Deuxième symptôme : le film est boursouflé de clins d'oeil appuyés aux fans de la licence. Super Mario Bros, un peu comme un oncle bourré qui te tape du coupe pour appuyer ses allusions pourries. Car s'il est rempli d'Easter Eggs (je ne suis pas fan du fan service, mais j'aime voir des références citées par des films lorsqu'elles ont du sens - d'où une certaine indifférence, pour ma part, par rapport à Ready Player One), ils prennent le pas sur la narration - déjà faible - du long-métrage, et m'ont donné l'impression d'assister à une longue déambulation dans un couloir de jouets pour enfants. Si écrire un film, c'est désormais faire une série de clins d'oeil à des spectateurs complices et déjà connaisseurs, je devrais me mettre à l'écriture...

Enfin, le film, s'achève, pour ma part sur un sentiment d'inachevé. Car je n'ai pas l'impression que les personnages ont évolués d'un iota. Et si Super Mario Bros n'est pas le cas le plus atteint (le MCU est le patient zéro, avec ces 8.000 séries pourries pour comprendre 1 film), il est un malade assez atteint du dernier symptôme : un film qui ne se suffit pas à lui-même. La scène post-générique (quelle invention débile...) de l'oeuf de Yoshi prêt à éclore donne le sens à cette réflexion. Le film n'est pas fait pour être un film à part entière, il est le premier épisode d'une série. De plus, ne comprenant pas les références que l'on me colle devant les yeux, comme un trousseau de clé que l'on agite devant un bébé, je pourrais être tenté d'aller jouer aux jeux pour pouvoir les comprendre. Je n'ai pas envie de voir un épisode de série ou une bande-annonce pour jeu vidéo quand je vais voir un film : je veux voir un film, un vrai.

A la fin du compte, pour ajouter au fun stérile et plat d'1h30 de film, j'ai plus eu l'impression de voir une publicité télévisuelle, une cinématique de jeu vidéo, qu'un véritable film, qui n'est là que pour me dire que l'univers Mario est un univers intéressant, et qu'il faut acheter des jeux vidéos et attendre un deuxième, troisième, quatrième film pour véritablement ressentir ce monde, et faire parti des initiés qui seront à même de comprendre le millier de références toutes pétées du film... Je trouve ça assez gerbant. Et j'en ai marre d'être pris pour un con par Hollywood.

Agregturp
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le 27 mai 2023

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