Tourné en même temps que le premier Superman, ce deuxième opus possède une étrange particularité : il existe en deux versions distinctes. L'une, tournée par Richard Donner, poursuit la dynamique entamée par le premier volet et continue l’adaptation héroïque et sérieuse du personnage de DC Comics. 75% des scènes avaient déjà été tournées lorsque le cinéaste entra en désaccord avec la Warner. Richard Lester fut appelé à la rescousse pour proposer sa propre version, il conserva certaines scènes mais en retourna la majorité. C'est la critique de la deuxième version qui est proposée ici.
On retrouve tous les personnages du premier film. Lois Lane est à Paris pour couvrir une attaque terroriste sur la tour Eiffel. Superman, de son côté, envoie une bombe atomique dans l'espace qui libère les prisonniers kryptoniens de la zone fantôme. On se dit d'office que ça commence mal. Impossible que le scénariste, Mario Puzo, ait pu écrire un truc pareil. Mais passons. La suite est du même goût : elle expose l'évasion grotesque de Lex Luthor, façon benny Hill, qui, en prison, invente un détecteur d'onde gamma pour trouver la forteresse de solitude. Stop, l'évidence est là : Richard Lester n'est pas Richard Donner, les deux cinéastes n'ont visiblement pas la même vision du héros en slip rouge. L'un jouait du savant mélange entre héroïsme et romance, l'autre tourne une comédie. Ça fleure bon la série B grotesque, le pastiche digne d'un beau nanar, Superman version Lester c'est une midinette qui prépare le dîner dans la forteresse de solitude et qui baise Lois Lane. Sacrilège ! Les fans ne s'en remettront jamais.
Les conceptions se mélangent. L'adaptation humoristique de Lester s'emmêle à la transposition de Donner. Le script, à force d'avoir été tiraillé de tous côtés, ne présente plus aucune logique scénaristique. Les incohérences sont légions, les faux raccords visibles (Zod qui marche sur l'eau, ridicule), les raccourcis pullulent, rien n'est à sa place, le massacre est total. Les différentes interprétations ne sont pas en restes, Terrence Stamp est risible costumé en acrobate de cirque, Gene Hackman s'auto-caricature, Marlon Brando, parti après le renvoi de Donner, avait plus de présence et de charisme en dix minutes sur le premier film que tous les seconds rôles sur le suivant. Même l'action, chorégraphié avec les pieds, ne sauve Superman II du naufrage.
Avoir échangé les cinéastes en cours de route fût une erreur créative terrible pour la Warner. Le succès sera pourtant au rendez vous, le virage humoristique entamé par le cinéaste n'effraya en rien les nombreux spectateurs. On pourra toutefois difficilement admettre que les changements effectués aient valorisé l'idée qu'on se faisait de Superman. Et si l'affront vous est trop terrible, on ne saurait mieux vous recommander la version Director's Cut de Donner. Cette variante, validée par la Warner en 2006, rend toutes ses couleurs au super-héros. Merci qui ? Merci Richard.