Toute histoire individuelle, transposée en littérature ou au cinéma, et surtout si elle est faite de blessures et de réparation, a vocation à devenir universelle, pour que chacun, lecteur ou spectateur, y trouve peu ou prou une réflexion qui fait sens pour lui. Du livre de Sylvain Tesson au film de Denis Imbert, l'on sait, selon l'adage un peu usé, que peu importe la destination, c'est le voyage qui compte. Or, plutôt que de nous livrer ce périple dans sa continuité, pour en tirer la substantifique moelle, à travers la carte et le territoire, le film ne cesse de le hacher à grand coups de flashbacks signifiants, alors qu'un seul aurait suffi. Passons sur la voix off, parfois sentencieuse, et regrettons que les quelques rencontres en chemin ne sont que vignettes trop éphémères, pas assez riches pour nous faire ressentir la solitude de l'hyper-ruralité. En soi, le personnage principal, avec son statut d'écrivain-explorateur, charrie dans sa vie d'avant l'accident un certain nombre de caractéristiques attendues sur sa vanité, son égocentrisme et son aura de baroudeur viril. De son combat physique sur les sentiers escarpés, de sa mise à nu dans la souffrance et de son retour à une certaine humilité, le film n'est pas avare, heureusement, et lui confèrent un intérêt parcimonieux, sans oublier quelques belles images de paysages, comme quoi, le Cantal et le Mercantour possèdent un caractère exotique aussi fascinant que la Sibérie. Et Dujardin, alors ? Sobre et convaincant, il donne envie de regarder le Making of sur les futurs bonus du DVD, vraisemblablement plus passionnants encore que le film.