Luis Buñuel remercia Sergio Kogan qui l’avait soutenu pour « Los Olivados » en réalisant « Susana » dont le rôle titre fut confié à Rosita Quintana, la petite amie du producteur. Scriptant lui même les scènes pour la mise en scène, le cinéaste aragonais fait preuve d’une maestria dans la réalisation qui ne souffre d’aucune faiblesse : rythme, suspens, mouvements de caméra, cadrage et direction d’acteurs sont impeccables. Les faiblesses se situent sur le fond. La belle, évadée dune prison, est recueillie par Doña Carmen. Mais Susana sème la zizanie en séduisant l’intendant, le fils et le père déchiré entre son rôle de gardien de l’institution et le désir refoulé vis à vis de l’attirance sexuelle incandescente qu’il éprouve pour elle. L’ordre sauvera la famille d’une décomposition pourtant bien entamée. Si l’histoire rappelle celle de « Théorème » (à l’exception de relation du même sexe que Susana ne fait pas), la fin diffère diamétralement, le film de Pasolini étant clairement de gauche et anti conventionnel, celui de Buñuel à droite et bien dans les clous. Sans vouloir pencher d’un bord politique à l’autre, il est simplement regrettable que le cinéaste se soit contenté de la conformité sur un sujet qui ne l’était pas. Buñuel n’aimait pas ce film et sa filmographie ultérieure corrigera cette timidité (contrainte ?) de manière éclatante.