Charlotte Gainsbourg, Marguerite Duras, la Côte d'Azur...
Aucun élément de ce triptyque ne m'encourageait à voir le film. Au contraire.
Mais une petite voix diabolique a aiguisé ma curiosité et ... m'y voilà plongée.
Le film ne m'a pas laissée indifférente ; j'ai été révoltée, compatissante, indignée, tour à tour par ce personnage neurasthénique, enclos en lui-même, qui est Suzanna Andler. Voilà la force du film ; réussir à nous mouvoir, à nous faire raisonner quant à la léthargie et la résignation de cette femme qui, depuis trop longtemps, s'est résolue à accepter un rôle. À accepter la souffrance au point de ne plus souffrir, à accepter les conditions ( de son mari puis de son amant) au point de ne plus les voir telles quelles, à accepter son statut ( "femme la plus trompée de la Côte d'Azur") au point d'y plonger la tête la première.
Ce "quasi" huis-clos réussit un autre tour de force : les scènes se déroulant toujours à deux ( suzanna/ son amant, suzanna/son "amie" monique / suzanna/son mari au téléphone), on vient à penser que tous ces dialogues - fait de nœuds existentiels et de cette nette propension à l'incommunicabilité chère à Duras- ne sont peut-être que les projections mentales de Suzanna. Cette 1h20 et quelque, ne serait-elle finalement qu'un monologue intérieur ?
L’œil de Christophe Beaucarne renforce d'ailleurs cette sensation de nausée, de flottement interminable par une oscillation lente et gracieuse de la caméra, comme le clapotis des vagues, qui doucement avancent puis se retirent.
Pour tout cela, je lui accorde la moyenne. Néanmoins, l'ennui et la langueur, cette mélasse transparente qui pétrit l'existence de ceux qui ne connaissent qu'oisiveté, finit par nous atrophier les méninges. À nous rendre, à notre tour nauséeux. (Est-ce que Jacquot l'a voulu ? Je pense, oui.) Mais n'est-ce pas plutôt propre à Duras, qu'à Jacquot ? Et finalement, n'aurait-il pas réussi à rendre avec subtilité cette sensation que fait éclater en nous les dialogues de Duras ?