Malgré la différence du contexte géographique et de personnalité de ses héros respectifs, il est tentant de comparer Camille et Sympathie pour le diable, deux films qui tracent le portrait de reporters de guerre. Le film de Guillaume de Fontenay s'appuie sur un personnage fort, complexe, intransigeant et charismatique, Paul Marchand, une sorte de modèle de journaliste qui témoigne et agit sans pour autant nier le fait de sa relative inutilité dans le conflit qu'il couvre en ex-Yougoslavie, face à l'indifférence de l'Occident. Pas un héros, non, le film remet les choses à leur place, car la population de Sarajevo assiégée et menacée par les snipers occupe une part importante, à raison, dans cette dramaturgie constante. Sympathie pour le diable a des vertus documentaires mais aussi un côté romanesque, voire romantique, assumé, avec ce reporter arrogant, en mission, qui a aussi ce rapport ambigu avec la mort qu'ont tous les journalistes de guerre. Guillaume de Fontenay, qui n'avait signé qu'un court-métrage, a choisi de nous immerger dans un quotidien rythmé par le nombre de blessés et de morts, comme dans un étau mortel, à peine desserré par quelques moments de détente et de partage entre envoyés spéciaux. C'est âpre, parfois confus comme peut l'être une zone de guerre, avec la tragédie qui peut survenir à n'importe quel instant. Niels Schneider, méconnaissable sous son bonnet et ses lunettes, un éternel cigare cubain vissé aux lèvres, fait une composition sidérante. De nombreux films ont été tournés sur les conflits des Balkans, Sympathie pour le diable est l'un des plus saisissants et humains, sans céder une seule seconde à la sensiblerie.