Comme "Tropical Malady", le précédent film d'Apichatpong Weerasethakul, "Syndromes and a Century" décourage l'analyse critique : il est à peu près impossible de dire pourquoi et comment on peut aimer une telle expérience, si différente de tout ce que le cinéma propose (la comparaison avec Lynch me paraît finalement paresseuse...). Absence de scénario perceptible - au spectateur de se construire sa propre histoire -, lenteur radicale de certaines scènes, exigeant de nous un abandon total au flux de sensations extrêmement fines, presque délétères, générées par les images d'une clarté frôlant la transparence, rien ici ne dirige notre regard ni ne commande nos émotions (... soit une différence radicale avec l'oppression totalitaire à l'oeuvre chez Lynch !). Offrez-vous une heure et demi de dérive sensorielle, régulièrement bouleversée quand même par des ruptures de ton radicales, et par une poignée de plans abstraits, dégageant une fascination qui touche à la terreur mystique (le sublime plan sur la bouche d'aération...).