Take Shelter met en scène le talentueux Michael Shannon en père de famille à la vie simple, bien rangée et visiblement épanouie malgré le handicap de sa fille. Bref visiblement aucune ombre au tableau si ce n'est l'ambiance du film qui dès les premières minutes se fait mystérieuse. Le réalisateur Jeff Nichols rend immédiatement l'immensité du ciel menaçante à l'aide de plans lancinants doublés d'une musique discrète qui rendent l'ensemble intrusif pour le spectateur. Doucement mais sûrement, le film laisse s'immiscer la paranoïa chez un Michael Shannon d'abord sain d'esprit puis visiblement ébranlé par ses rêves. Mention spéciale d'ailleurs pour ses passages qui nous plonge immédiatement dans l'angoisse de cet homme. Encore une fois brillant comme dans son personnage de militaire sur le retour de Bug de William Friedkin (excellent film traitant de paranoïa), Shannon qui n'a plus rien a prouvé nous surprend même en père de famille normal au début du film tant on sait qu'il est bon dans l'interprétation d'êtres psychologiquement borderline (son rôle dans Boardwalk Empire). Jessica Chastain lui donne la réplique avec toute la détresse qu'une telle situation pourrait engendrer chez cette mère de famille. Et bien plus que son récit qui peut parfois paraître un peu lent, c'est surtout la justesse avec laquelle l'association Nichols/Shannon arrive à nous impliquer dans la santé mentale de son héros qui cherche continuellement des raisons rationnelles à ses délires presque mystiques qui nous attire. Le final n'en est que plus déroutant et savoureux tant les deux hommes arrivent à finalement jouer avec nos nerfs après les avoir doucement titillés pendant un peu moins d'une heure et demi. Au final, c'est d'abord un peu perdu dans notre ressenti que l'on reste devant le générique de fin mais le film continu à nous interroger encore quelques temps après sa vision. Un léger tour de force qui donne un bon thriller simple mais maîtrisé et véritablement emmené par ses acteurs.