Fred Zinnemann adapte un roman à succès de James Jones. Ancien combattant du Pacifique, Jones y décrivait la vie de caserne, vue par de simples soldats. From Here to Eternity est un film d’hommes, pour hommes. Passons rapidement sur les deux rôles féminins, la femme du capitaine (Deborah Kerr) et la taxi-girl (Donna Reed), elles aiment leurs biffins, mais ne parviendront pas les conserver.
Le capitaine Holmes (Philip Ober) est un triste officier. Persuadé que sa carrière dépendra des seuls résultats de son équipe de boxe, il court les filles et les bars, abandonnant sa troupe à son second. Le first sergeant Warden (Burt Lancaster) passe pour un excellent sous-officier, dur mais juste. Intelligent, il mène la compagnie comme il l’entend.
Si le destin ne les avait pas confié à Holmes, Prewitt (Montgomery Clift) et Zinnemann (Frank Sinatra) auraient pu faire de bons soldats. Prewitt doit tout à l’armée : il n’aspire qu’à servir son pays et jouer du clairon. Ce boxeur émérite a raccroché ses gants à la suite d’un accident. Zinnemann aime boire, rire et sait obéir. Que ce soit par intégrité ou orgueil professionnel, tous deux se refusent à accepter l’injustice. Ils ne plieront pas. Warden les protégera tant qu’ils demeureront sous son autorité. Mais, s’il refuse de passer officier, il ne risquera pas ses précieux chevrons en s’opposant aux ordres criminels de ses pairs.
La réalisation est d’un absolu classicisme. Burt Lancaster et Deborah Kerr roucoulent, leur longue étreinte adultérine dans les vagues du Pacifique défraya la chronique. Elle paraît aujourd’hui bien sage. Reste deux scènes admirables de Montgomery Clift : un solo de clairon improvisé dans un bar un soir de cuite et, poignante, la sonnerie aux morts pour son ami. Pas moins de huit oscars propulsèrent cet honnête film de genre au panthéon hollywoodien. C’est immérité, mais la justice n’étant point de ce monde, ne boudons pas notre plaisir.
Octobre 2018