Propulsé espoir du retour au cinéma, affublé d’attentes démesurées, il était difficile pour Tenet de ne pas nous décevoir. Maintenant, cette critique n’engage que moi, il n’y a rien de mal à avoir aimé le film. De mon côté, comme de nombreuses personnes, oui j’ai été déçue. Honnêtement je n’ai pas vu le temps passer devant le film, d’autant qu’il n’y quasiment jamais de pause. Mais malgré ce rythme intense, je n’ai jamais été complètement embarquée, ni réellement divertie.
Inception avait un concept tortueux mais une mise en place assez ludique grâce au recrutement de l’équipe, et Interstellar contrebalançait savamment les vulgarisations scientifiques et une grade émotion intime. Bref ces derniers films montrait que Nolan pouvait être technique, ambitieux mais divertissant et touchant. Ici le film est très froid, et pendant un très long moment on suit juste un protagoniste sans nom qui va voir une première personne qui l’envoie vers une seconde, qui l’envoie vers une troisième… Le concept de manipulation de temps s’effondre sur lui-même au fur et à mesure du film, bourré de petites mais multiples incohérences. Ainsi pourquoi les pompiers ne remarqueraient pas des brancardiers inversés ? Le chaos ambiant ne suffit pas, les pompiers étant plutôt formés à ce genre de situation. Le film oppose également deux concepts, celui de la pertinence du libre-arbitre affirmé par Clémence Poésy pendant que Robert Pattinson nous affirme que tout ce qui est arrivé arrivera, soit une fatalité inéluctable.
Au milieu de ça on nous dit clairement qu’il ne faut pas chercher à comprendre mais seulement à ressentir. Mais ressentir quoi au juste ? Tenet pêche par son manque d’empathie et d’émotions. les personnages sont peu développées et le rythme frénétique ne nous permet pas de nous attacher à eux ; leur sort nous est au final égal. La mort est dispensée de façon désinvolte et rapide, sans conséquence et sans état d’âme, vu que c’était « écrit ». Toutes ces circonvolutions ne sont qu’un artifice pour cacher une scénario et des enjeux de base bien maigres
(sérieux je détruit le monde parce que j’ai une maladie incurable ?)
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Derrière la caméra, on voit que Nolan s’amuse, les scènes d’actions sont impressionnantes, on garde le rythme grand spectacle. La musique en revanche est trop lourde, bien en deçà des standards habituels du réalisateur. Pour moi, Tenet n’est clairement pas un grand film, et loin d’être le meilleur du réalisateur. Cela dit, retournez quand même au cinéma, il y a d’autres films à voir. Le destin du cinéma ne peut être lié à Tenet seul. Si ce film s’effondre sur lui-même, on peut reconnaitre à Nolan sa volonté d’expérimentation jusqu’au-boutiste du temps, son thème de prédilection. Et si c’est un échec, je le renvoie à la réplique de son propre Batman « Why do we fall ? ». Rendez-vous au prochain film, mon admiration reste intacte.