Terre sans pain par yaya-dc
Terre sans pain a quelque chose de profondément malsain. Il montre la misère d'un village espagnol, en l'accentuant si besoin par des partis pris de mise en scène entièrement assumés. Il est évident qu'il ne laisse pas la caméra retranscrire la réalité, il veut faire passer un message et ne se privera pas d'intervenir si besoin sans pour autant laisser le spectateur dans l'illusion. Dans la salle de classe, il précise qu'il a demandé à l'élève d'écrire la maxime "Respecte les biens d'autrui" qui va dans le sens du message qu'il veut transmettre. Après la sortie du film il ne cachera pas les artifices qui ont été employés : la chèvre qu'il fait tomber de la falaise, l'âne mort qu'il recouvre de miel pour attirer les abeilles. Les morts sont réelles, mais il intervient pour les rendre plus marquantes à l'écran.
Son commentaire reste monotone tout le long du film, notamment lorsqu'il évoque la mort d'une petite fille qui disparait avec un fondu au noir. On a aucune preuve qu'il dit la vérité, mais sa parole neutre suffit pour qu'on le croit. Plus tard dans le film, il représente à nouveau la mort d'un enfant. Cette fois, il filme directement le cadavre d'un enfant. Puis un plan sur une femme avec pour seul commentaire "La mère".
"Une mort c'est un des seuls évènements qu'on peut enregistrer dans ce village misérable."
Ce film a donc quelque chose de profondément malsain. La mort semble être l'élément principal, qui servira de contenu au film, qui pourra transmettre le mieux ce message de dénonciation. Sans mise en scène de la mort et de cette misère le film aura moins d'impact sur le spectateur.
Peut-on transformer la réalité, caméra à l'épaule, pour fournir le matériau à un film qui, par sa diffusion, pourrait changer cette situation misérable ?
La réalité telle qu'elle est dans les Hurdes toute l'année ne pourra jamais être traduite fidèlement par un film de 30 minutes. Il peut alors être légitime de vouloir utiliser le langage cinématographique et ses artifices pour s'en rapprocher.