Après un premier opus plutôt rafraîchissant et un deuxième presque intéressant, la série Terrifier a su créer un véritable engouement, renforcé par la décision du réalisateur Damien Leone de refuser le financement des grands studios pour préserver sa liberté artistique. C’est donc avec un enthousiasme certain que le fan de films d’horreur et de gore que je suis s’est rendu en salle pour découvrir ce troisième volet.
Je commencerai par saluer l’iconographie des antagonistes, qui est remarquable. Le visage lacéré de la nouvelle acolyte d’Art, déjà une réussite dans le premier volet, est particulièrement dérangeant. Innover dans l’image du clown effrayant n’est pas chose aisée, compte tenu de la concurrence qu’a générée un siècle de cinéma d’horreur. Pourtant, ce personnage est particulièrement réussi et constitue l’une des forces de la franchise. Le contraste entre le blanc cadavérique du maquillage et le rouge vif du sang des victimes d’Art crée un effet particulièrement troublant, accentuant l’aspect macabre du personnage. Son mutisme, semblable à celui d’un mime échappé d’un film muet, amplifie encore le malaise. Alors que les tueurs muets dans les slashers sont monnaie courante, les antagonistes qui ne produisent ni rire ni cri sont beaucoup plus rares.
Le film est par ailleurs visuellement réussi. L’esthétique, pensée comme un hommage aux films de genre des années 80 avec l’ajout d’un "effet VHS", donne une véritable personnalité à la saga, même si l’approche est loin d’être révolutionnaire. Les séquences gore, bien plus généreuses et délirantes que dans les deux premiers volets, permettent au film d’atteindre pleinement son objectif : offrir une jubilation presque cathartique face à une surenchère de violence déraisonnable, rare pour un film distribué en Occident.
Distribué en Occident… et c’est là que commencent mes interrogations sur le film. Car si un tel spectacle est relativement innovant dans nos salles européennes (en dehors du cinéma extrême indépendant), aucune des séquences n’est véritablement inédite si l’on se tourne du côté de nos amis japonais, qui ont excellé dans ce type d’images brutalement sanguinolentes bien avant l’Occident. Depuis que ces séquences ont été mises en scène par le cinéma gore japonais, ce dernier n’a pas significativement évolué en 40 ans… Car logiquement, le corps humain a des limites, et ce qu’on peut en faire aussi. Le spectateur est anesthésié par cette trilogie, et monter d’un cran sera difficile, à moins de renoncer à l’humour qui vient systématiquement désamorcer l’horreur par l’exagération absurde.
Comment continuer la franchise, donc ? S’orienter vers une pure comédie noire, ce qu’elle est déjà presque, et que l’on a déjà vue de nombreuses fois ? Caricaturer des scènes gores est amusant pour un, deux (allons, disons trois) films, mais je doute que Damien Leone puisse véritablement continuer la franchise ainsi éternellement sans y ajouter un propos supplémentaire, à l’heure où l’« elevated horror » est en vogue.
Ce troisième volet ouvre la voie à un potentiel film de dark fantasy. Est-ce la direction que l’on prendrait ? Je l’espère, mais cela reste encore timide. Le deuxième volet introduisait déjà cet aspect, mais il n’a pas vraiment été exploité dans ce troisième film, qui laissait pourtant la place au développement d’un scénario un peu plus riche.
En bref, Terrifier 3 est un film agréable et très visuel, mais la franchise gagnerait à nous offrir quelque chose de plus.