Rentré d'Amérique après son très décevant Le dernier rempart, Kim Jee-woon s'attaque avec The Age of Shadows au film d'espionnage dans le contexte de plus en plus prisé par le cinéma coréen de l'annexion du pays par le Japon (1910-1945). Situé plus précisément dans les années 20, le film confronte notamment la résistance coréenne et la police où officiaient également des collaborateurs de la même nationalité. Une période d'ambigüité qui sied parfaitement à un film de genre, noir et riche en duperies et doubles jeux. Dans ce Séoul, nid d'espions, après de premières scènes tonitruantes, Kim s'applique à respecter tous les codes de ce cinéma, le diluant parfois dans des moments beaucoup trop bavards, le film étant d'ailleurs d'une durée excessive. Le réalisateur de J'ai rencontré le diable n'a cependant pas perdu sa maîtrise, ce qu'il fait principalement constater dans une époustouflante série de scènes tendues à leur paroxysme à bord d'un train. Malgré une impeccable reconstitution d'époque et une interprétation impeccable, le film manque cependant de compacité et fait preuve d'un certain classicisme assez surprenant de la part d'un cinéaste qui nous avait habitué à davantage de folie. Il est toutefois dommage que le film n'ait pas été distribué dans les salles françaises, ne serait-ce que pour apprécier la splendeur de sa mise en scène auquel de plus petits écrans rendent beaucoup moins justice.