Youth without truth
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le 9 oct. 2024
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New York est sale, comme un symbole de l’Amérique décadente mais libre des années 70, à l’instar de certains de ses dirigeants. C’est l’époque du président Richard Nixon, homme de compromis et de compromissions.
L’entreprise du père Trump est accusée de ségrégation. Le jeune Donald relève lui-même les loyers dans un immeuble peuplé de gens pauvres, malades ou fous, mais blancs. À ce moment du film, on pourrait avoir de l’empathie pour ce personnage seul, qui s’en prend plein la gueule par ses locataires, son père et les professionnels. Il n’est pas crédible mais il est tenace. Le jeune spéculateur rêve de récupérer un hôtel à l’abandon sur la 42e Rue pour en faire un hôtel de luxe. L’idée est interessante pour redonner de la dignité au quartier mais les moyens pour y arriver sont révoltants. Sa rencontre avec l’avocat Roy Cohn (Génial Jeremy Strong) va lui permettre de révéler sa nature de tueur. En gros, ils vont réussir à compromettre les autorités décisionnaires de la ville pour faire leur fortune avec de la spéculation immobilière, sur le dos des contribuables lambda.
Le jeune loup, inculte, ne connait pas Andy Warhol. Dans une courte scène, l’artiste le ridiculise. Trump s’exprime de manière relativement pauvre (VOST). Obsédé par la puissance des hommes d’affaires, il traine dans un Club Privé fréquenté par les Vanderbilt, les Murdoch etc, et dont il se vante d’être le plus jeune membre. La lumière y est artificielle. Donald est assis autour d'un guéridon avec pouffe, puis dans la salle arrière avec Cohn.
Le film montre aussi la relation de Donald avec sa mère, son père et son frère ainé (alors que le reste de la fratrie est inexistante), une famille conservatrice. Les intérieurs familiaux sont surchargés, les cadrages étriqués. Au contraire le bureau de la réussite plonge outrageusement sur le quartier d’affaires. La maison du jeune couple est monumentale et froide, les personnages (lui, sa femme, son bébé, la nounou…) sont prisonniers de ce vide, de ces pièces inanimées. Quant aux projets immobiliers, l’homme d’affaires annonce grand, on en voit peu, comme la cascade intérieure de 18 mètres qui se révèle à l’image être est un goutte à goutte su fond de marbre rose.
Donald Trump parvenu à se faire une réputation, refuse de participer aux élections aux côtés du républicain Ronald Reagan, disant que les politiciens sont débiles. Quelle ironie. « Except few » bouche en cul de poule par Sebastian Stan plus vrai que le vrai. Il souhaite bonne chance à ce bon vieux « Ronnie » avec son slogan original : Let’s Make America Great Again qu’il a repris depuis sans le "nous" (sans Let's).
L’interprétation est magnifique, le montage remarquable, le sujet et le point de vue contre le milliardaire-candidat à la Présidence pour la deuxième fois, sont gonflés. Car ce qui fait surtout de ce film un événement, c’est qu’il sorte sur les écrans pendant la campagne présidentielle américaine 2024 en indiquant que les 3 règles qui ont permis à Donald Trump d’accéder au pouvoir - à savoir 1) Attaquer 2) Nier 3) Ne jamais reconnaître sa défaite- datent d'un autre temps.
Le film est pro américain, pour la démocratie réputée la plus grande. Il en dénonce les dangers en mettant en scène la liberté à son paroxysme : tous les coups sont permis et le complot est fomenté par les adeptes des théories du complot dans la vraie vie. Une mise en abîme, où la fiction renvoie à la réalité quasiment en temps réel. Est-ce que ça en fait un film important pour autant ? Malheureusement les témoignages d’américains dans la presse indiquent que les pros Trump qui pourraient être dissuadés de voter pour lui, n’iront pas voir le film, et que les antis Trump ne vont pas forcément payer 20 dollars (oui, le ticket de cinoche aux E.U est entre 11 et 20 dollars !).
Restent les indécis de la campagne… Est-ce que le sort d'un pays repose sur du cinéma ?
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Créée
le 28 oct. 2024
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