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Après l’échec relatif du DC Extended Universe, l’avenir très incertain des licences DC y étant associées, et le succès phénoménal de Joker au box-office en 2019, The Batman portait en lui l’espoir de millions de fans. Une production chaotique, des décalages à répétition… ce film n’aura pas eu une sortie facile. Pour quel résultat ?



Le meilleur film Batman de tous les temps ?



C’est certain, The Batman surpasse ses prédécesseurs dans beaucoup de domaines. Le principal point fort de cette nouvelle version du chevalier noir est l’esthétique, ainsi que l’ambiance et l’atmosphère apportée à Gotham. Matt Reeves propose une direction puissante, léchée, supportée par la photographie magnifique de Greg Freiser (Dune). Ce film est la preuve que la rencontre entre une vision pertinente pour un personnage de comics et un parti pris artistique et technique s’éloignant du cinéma de blockbuster classique peut faire des merveilles. S’éloignant également du Gotham hyper réaliste et sans identité proposé par Nolan, la ville est un personnage du film à part entière. Le choix constant de mise en scène de la nuit, de la pluie, de l’obscurité, et le traitement de tous les personnages établissent The Batman comme la version cinéma la plus sombre et torturée jusqu’à présent, et la plus cohérente en tant qu’adaptation.
L’esthétique choisie pour le film renvoie d’ailleurs beaucoup plus souvent aux comics que les versions précédentes. A travers les choix de Matt Reeves, on peut distinguer certaines inspirations très précises : Lee Bermejo, Loeb et Sale, mais aussi Batman Year One et même un petit peu de Scott Snyder dans le traitement de Gotham et de la pègre . Certaines mises en scène sont époustouflantes : la poursuite en Batmobile, les jeux d’obscurité dans la boîte de nuit, les plans larges des toits, la scène de fin avec le fumigène… Tous les choix artistiques sont justes et intelligents, correspondant parfaitement aux personnages et au thème du film (choix de décors et de mise en scène pour la pègre).


Un autre point important de l’esthétique réside dans le choix des décors (réels et CGI). Le manoir des Wayne est résolument gothique, Gotham apparaît comme une ville insalubre, sale.


L’inspiration des comics est également un immense point positif. Alors que Nolan s’éloignait du matériel d’origine pour faire correspondre sa trilogie à son objectif d’inclusion d’une histoire de comics dans un univers réaliste et contemporain, Snyder était revenu à une adaptation beaucoup plus terre à terre et brutale d’un Bruce Wayne fatigué et aigri. Reeves trouve un compromis : sa version de Gotham et de Batman est probablement la plus proche de ce qui a été écrit ses dix dernières années. Cet argument est confirmé par ses choix esthétiques mais aussi et surtout sur le développement du personnage de Bruce, ou plutôt de Batman. Car oui, ce film se focalise quasi-exclusivement sur Batman, et laisse de côté Bruce Wayne. Cela se justifie par plusieurs choses : Bruce est jeune, et après deux ans de lutte, son combat et son rôle de Batman ont tellement pris le dessus sur sa vie qu’il se définit quasi-uniquement par son alter-ego. C’est d’ailleurs une observation du Riddler pendant leur confrontation qui nous le fait comprendre, lorsqu’il souligne que Bruce n’est lui-même que lorsqu’il porte son masque. On retrouve donc un Batman diabolique, violent et déterminé à faire tomber le Riddler, puis par extension la pègre. Robert Pattinson est plus que convaincant dans son rôle, lunatique et quasi-dépressif en tant que Bruce Wayne, menaçant et parfois enragé en tant que Batman. Ainsi, Reeves se différencie par la psyché de son personnage principal. Alors qu’Affleck était résigné, que Bale était pragmatique, Pattinson est torturé, plus proche des dilemmes moraux abordés dans les comics.



Un scénario original et des vilains différents



Une autre raison du succès de ce film est son scénario. Plus proche des titres Detective Comics que Batman, on suit une enquête complexe du chevalier noir avant que le climax ne renvoie aux grandes catastrophes orchestrées par les vilains dans les comics. Voir la pègre comme réelle antagoniste et non plus comme un univers parallèle qu’on ne combat qu’à travers quelqu’un d’autre est également assez rafraichissant. Falcone et le Pingouin sont sensationnels, et créent un univers à part entière à l’intérieur de Gotham. Les deux premières heures du film nous emportent dans cette enquête explorant les secrets de l’élite de Gotham, et abordant frontalement la corruption et ses responsables, puis la pègre et ses représentants majeurs. Le spectateur est amené dans plusieurs directions, en suivant plusieurs suspects, notamment Le Pingouin, qui se démarque vraiment des autres personnages secondaires tant ses ambitions et sa personnalité correspondent à ce que ce méchant classique devrait incarner : l’ambition, l’opportunisme, la soif de pouvoir. Beaucoup de critiques comparent certains choix de réalisation et de mise en scène à Zodiac ou Seven, et on peut effectivement établir quelques liens, mais ce film a sa propre identité.


Autre aspect intéressant, le rôle du Riddler. Dans Batman Begins, le combat de Ras est contre Batman, en plus d’être contre Gotham. Dans The Dark Knight, le Joker prend Batman pour cible ultime et témoin de son plan. Dans The Dark Knight Rises, Bane et Talia s’en prennent à Bruce. Dans The Batman, Batman court après un criminel, qui a un plan qui ne le vise pas directement. L’ennemi du Riddler n’est pas Batman, mais l’élite de Gotham. Il ne souhaite pas s’en prendre à Batman, puisqu’il est prisonnier de sa propre fantaisie qui le verrait allié au chevalier noir. Dans ce film, Batman court après les évènements, est en retard, doit résoudre et combattre pour rattraper quelqu’un qui a toujours un coup d’avance, mais pas contre lui. Ne pas avoir de réelle confrontation est déstabilisant. Jamais on ne verra de combat entre le Riddler et Batman. Aucun « grand duel » n’est d’ailleurs présent dans ce film. Les scènes d’action mettent en scène Batman contre des hommes de main, des mercenaires, tous anonymes, mais jamais contre une personnalité connue. On se rend alors compte que Gotham est dirigée par le crime, la violence et la corruption, qui va au-delà de la pègre, au-delà des vilains classiques, mais qui est incrustée dans la ville.


Autres points positifs en cascade : la musique, bien évidemment, qui enrichit chaque scène et qui réussit l’exploit de créer un nouveau thème classique pour Batman, après que tant de musiques iconiques aient déjà été proposées par les précédents films. La chorégraphie des combats, bien que moins mémorable que les scènes Arkhamesques de Batman vs Superman, est efficace. Catwoman est une excellente addition au casting, tout comme Gordon et le rôle du GCPD dans le film.


Conclusion : The Batman gagne mon admiration. Son parti pris scénaristique, son esthétique unique, et la qualité d’adaptation des personnages et de Gotham sont des éléments qui me font davantage adhérer à la version de Matt Reeves qu’à celle de Nolan ou de Snyder. Même si le film n’est pas exempt de légers défauts, je le considère (après avoir revu The Dark Knight) comme le meilleur film Batman jamais réalisé et incarné.



Quels points faibles ?



C’est trop long. Oui, c’est un vrai défaut. Bien que je ne décèle pas de problèmes de rythme pendant le film, l’équilibre entre l’enquête et le dernier acte m’a gêné. Après la « mort » de Falcone (je suis convaincu qu’il est toujours en vie), la fin du film est assez longue à arriver.
La scène du dialogue entre Batman et le Riddler est également un problème selon moi. J’ai eu l’impression de voir une tentative ratée de reproduire l’interrogatoire inégalable entre Batman et le Joker dans The Dark Knight. Je n’ai pas été particulièrement convaincu par Paul Dano pour cette raison : on a trop voulu mettre l’accent sur sa folie, à tel point que sa mise en scène en fait trop pour la prouver au spectateur.


Alfred et les Wayne sont également des points importants à aborder. Le rôle d’Alfred est très différent de ce qu’on a pu voir jusqu’à présent, puisque sa relation avec Bruce est conflictuelle ou au mieux distante. Son traitement est parfaitement cohérent, mais je ne suis simplement pas convaincu par Andy Serkis, que je trouve assez plat, ne correspondant pas vraiment à la personnalité d’Alfred. Pour un film qui honore aussi bien les comics, j’ai trouvé ce rôle manquait de justesse.


Enfin, parlons de l’avenir de cette franchise. Pas des trois séries HBO Max déjà prévues, mais du futur des films. Quelles graines sont semées dans The Batman ? Tout d’abord, j’ai été extrêmement déçu de ne pas retrouver d’indices sur la cour des hiboux dans l’épilogue, ou même pendant l’enquête, qui parlait des élites et des cercles de pouvoir à Gotham. Déçu, probablement parce que je voulais trop voir ces éléments. La théorie selon laquelle les parents de Bruce appartiendraient à la cour a attisé ma curiosité, mais j’attends de voir si la suite de cette saga abordera cette organisation devenue si populaire auprès des fans, et encore jamais vue au cinéma ou à la télévision. Déçu également, car ce que j’ai vu à la place ne m’a pas du tout convaincu. Joker ou non, le patient non identifié d’Arkham en est quand même très proche. Et j’avoue que ce choix me laisse perplexe et plutôt amer. Le Joker est iconique, oui, mais est devenu tellement attendu que je ne m’attendais pas à ce qu’un film aussi original et magnifique que The Batman tombe dans cette facilité.


Même si Matt Reeves a déclaré que cette scène n’allait pas forcément avoir un lien avec la possible suite, j’aurais beaucoup plus apprécié un choix unique et original, voire même des indices sur un futur Dick Grayson ?


Note : 9,5/10 contre le 9/10 de The Dark Knight

CptGrayson
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le 8 mars 2022

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