Un portrait gentiment sadique de toute la face business d’Hollywood, qui prend sacrément cher à travers le personnage principal et l’effondrement de son univers. Car non seulement il est présenté comme un type faux, égocentrique et colérique, mais le film prend aussi un malin plaisir à le torturer.
C’est une satire de l’ère post #Metoo, qui montre des hommes d’affaires terrifiés à l’idée du faux-pas, au point de devenir incapables de fonctionner. Le bourreau, ce n’est pas le jugement du public, c’est leur propre peur d’être jugés. C’est donc le film d’une implosion, celle d’hommes qui sont les reliques d’une autre époque et que la pression d’un nouvel environnement fait s’effondrer.
On retrouve donc la classique crise de nerfs faite film qui caractérise le style de Jim Cummings. Il est très bon dans cette énième variation autour de la même note. Après le craquage nerveux attendrissant (Thunder Road), puis inquiétant (Snow Hollow), voilà le pathétique.
Dans le genre, son jeu d’acteur est riche et efficace, mais ça passe par des tics face auxquels la tolérance peut varier. C’est surtout la toute fin du film où ça devient du pur cabotinage, mais certains en auront peut-être marre dès le 7e faux sourire qui masque une envie de hurler. Mais il a tellement la tête de l’emploi que, personnellement je ne lui en veux pas d’exploiter son potentiel jusqu’au bout.
Au-delà de son jeu, on retrouve les mêmes originalités et les mêmes tics dans sa mise en scène, elles aussi réfléchie pour prolonger au maximum la nervosité du personnage et le décalage qu’il creuse avec son environnement, dans lequel il n’arrive plus à évoluer.
Et puisqu’on a établi à quel point les apparences comptent dans son univers, cette crise n’en est que plus grave et sans fin. C’est une ironie que le film savoure à grand coup de cadrages ingrats, de raccords discordants et de silences pesants, tandis que la trajectoire tragi-comique est renforcée par des morceaux de musique classique, qui soulignent par ironie la petitesse de ce qui se joue devant nos yeux.
Cette énergie nerveuse n’est sûrement pas faite pour tout le monde car, encore une fois, tout le film est déterminé à nous faire assister au spectacle d’un homme qui sabote son existence de la manière la plus gênante et pathétique possible, sans jamais dévier de cet objectif. Soyez prévenus, si vous n’aimez pas l’auto-sabotage frénétique dans vos récits, évitez.
Certains, au mieux, trouveront ça monotone. D’autres, au pire, trouveront ça sadique, voire immoral, d’autant condamner un homme certes infidèle et antipathique, mais pas pour autant un violeur ou un harceleur. Juste quelqu’un qui n’a pas la conscience tranquille. Un homme, dans tout ce qu’il a de médiocre. Mais bon, on ne peut pas reprocher à une satire d’avoir des dents, ni d’être déterminée dans son approche.En revanche, on peut éventuellement lui reprocher sa cible facile.
Et surtout son troisième acte confus, où tout à coup le méchant, c’est… Internet ? Bizarre pour un film qui jusqu’ici semblait vouloir profiter de l’air du temps pour triturer nos propres consciences coupables. J’ai vraiment pas tout compris à ce niveau. Peut-être que le film aurait dû continuer à tirer à boulets rouges pour voir qui se sentait visé plutôt qu’essayer de donner des leçons derrière. Mieux vaut rester une satire bête et méchante de la masculinité que virer aussi bizarrement sur l’ère digitale et le retour à la terre.