Par moments, je me suis salement ennuyé au cours de ce film qui vit dans l’ombre d’un certain nombre de ses prédécesseurs (je sais que Morse est le plus cité).
Parce que l’ensemble prend du coup un air assez programmatique, malgré l’originalité soulignée à droite et à gauche. Pas tellement dans le scénario, mais surtout dans le style, avec cette mise en scène froide, distante, pour souligner encore davantage, par décalage, l’horreur des séquences convoquées.
J’ai vite compris qu’on n’allait pas sortir de cette tension certes maîtrisée et d’où émergent parfois quelques images fortes, mais dont le côté glacial et pseudo-élégant commence à être un peu remâché. Poser un regard clinique qui raffermit le réalisme de ce qui se tient à l’écran est un truc que, je dirais, 50 % des films d’horreur font aujourd’hui, donc je ne peux pas applaudir ce minimalisme comme un truc vraiment bouleversant.
Plus bouleversant je dirais est l’idée maligne sur laquelle se fonde le scénario : pousser plus loin l’authentique cruauté dont les enfants peuvent faire preuve. Parce qu’on sait que c’est authentique, et que c’est quelque chose qu’on ne peut ni totalement comprendre ni totalement influencer, le film se révèle parfois vraiment troublant.
En le couplant à cette approche supposément neutre de la mise en scène, il n’a qu’à élaborer un scénario qui part du comportement connu (la soeur qui pince l’autre) pour atteindre l’horreur absolue, en passant par un épisode traumatique avec un chat (mais que, pour le coup, j’ai vu venir dès son apparition), et il parvient à faire naître un trouble qui se base sur notre expérience du réel.
On sait que les enfants ne sont pas des anges tout mignons, mais qu'ils peuvent être sales, malsains, cruels… Et l’univers parallèle de leurs jeux nous est inaccessible, il n’existe qu’à leur niveau, alors qui sait si quelque chose de profondément morbide n’est pas en train de se tramer dans les squares ou les halls d’immeubles ?
Idée maligne qui joue sur l’angoisse que des esprits meurtriers se forment autour de nous sans que l’on n’en ait conscience. Donc je comprends le cadre tristement banal des HLM et l’approche tout en retenu du langage visuel du film, pour mieux faire émerger le verso horrifique de cette banalité, mais… On s'ennuie quand même souvent aux côtés de ces personnages purement antipathiques, programmés pour nous horrifier, justement parce qu’ils ne peuvent pas le faire en permanence. Le reste du temps, face au conflit qui montait avec une approche tout en sourdine, je me suis juste dit que l’idéal serait qu’ils y passent tous.
Et comme je m'ennuyais un peu, j’ai aussi fini par me dire qu’il y avait un vague côté raciste dans ce récit de petites norvégiennes qui entrent en contact avec un gamin de couleur qui ne fait qu’exacerber la violence en elle, jusqu’à ce qu’elles disent stop. C’est-à-dire que le gamin de couleur est le monstre de service, les petites aryennes sont celles qu’il a corrompu et qui doivent le stopper, et l’autre fillette est peut-être elle aussi typée mais puisqu’elle est atteinte de vitiligo et a donc la peau décolorée (on souligne aussi via une photo en gros plan que son père était blanc), elle est elle aussi est une force positive. Enfin je sais pas, je me fais juste peut-être une mauvaise image de comment les Norvégiens peuvent représenter le multiculturalisme et les cités HLM.
De toute façon, le vrai problème du film, c’est sa lenteur et le fait qu’il semble détester ses personnages. Ça, il n’y a rien à faire, sauf s’il avait accéléré la montée de sa tension en coupant quelques moments de latence. Mais trop tard pour ça.