Cette foutue planète tourne sur elle même à quelques 1670 kilomètres par heure, mais ce n'est pas tout. Cette foutue planète gravite à quelques 30 kilomètres par seconde autour d'une étoile condamnée, mais ce n'est pas tout. Cette foutue planète fonce sans jamais s'arrêter un seul instant, parait-il même, dans un univers en expansion constante, éternellement dilaté. Tournis cosmique ! Célérité céleste ! Mais ce n'est toujours pas tout. Sur cette petite planète rotative encore, foutus d'avance, se ratatinent des milliards d'insignifiants éphémères, débordés par des activités débordantes, quoique vaines. Et c'est à peu prés tout.
Mais de tout ça, le dude se contrefout totalement. Éperdument. Infiniment. Ce qu'il veut le dude, gros Lebowski de son état, c'est juste se la couler douce une bonne fois pour toutes. La vitesse c'est pas son dada. Le dude, il envisage la vie à son rythme, le seul qui lui convienne, parce que c'est sa petite vie après tout. Alors il se complaît en éternel oisif, ardent seulement sur la chnouf et le russe blanc, qu'il prise fort au demeurant. Il se hâte avec lenteur vers l'inexorable, la culbute mystérieuse. Il a raison le dude. Pourquoi se presser ? Il a bien compris que de la naissance au trépas, la seule chose qui compte vraiment sur cette terre, c'est de se laisser emmerder le moins souvent possible par des choses qui justement, nous emmerdent. Comme le turbin par exemple. C'est vrai ! Le turbin c'est biblique ! Le châtiment de deux cocos assez noix pour bouffer une pomme sur les conseils d'un serpent. Et il est absolument hors de question que le dude paie pour les conneries des autres. Même pas en rêve. Il a tout compris le dude je vous dis. Chacun ses emmerdes. Il travaille pas. Question de principe.
Souventes fois Walter, sienne connaissance d'icelui, le rejoint pour des parties de bouligne compétitives, à la salle de bouligne du coin. Walter il est un peu pété de la tête depuis le Vietnam, ça lui a un peu chamboulé les saisons cette affaire, mais ce n'est pas tout. Il est pas mal pété du cœur aussi le Walter, et ça on s'en rend compte tout doucement, quand quelquefois ça le rend émouvantable avec les autres. Enfin bref, le bouligne au dude, c'est son petit plaisir personnel quoi, sa petite activité débordante à lui, de concert avec la chnouf et le russe blanc, qu'il prise fort au demeurant. Donny aussi, leur connaissance d'iceux, affectionne les joies du bouligne itou, tout chétif et timoré qu'il est. C'est le troisième larron de la bande Donny. Avec Walter et le dude, ils forment un sacré brelan de branleurs. Ils sont liés comme les trois mousquetaires de la main. Inséparables dans la branlitude.
Tout ça pour dire que le dude, il menait une vie tranquillement peinarde le saligaud. Tout se passait bien.
Jusqu'à ce que son tapis se fasse outrageusement souillé par des urineurs anonymes. Ça le dude, il admet pas des masses. Question de principe ! Mais les principes ça cause des emmerdes des fois. Et cette péripétie, c'était précisément la promesse d'un paquet d'emmerdes pour lui. D'un paquet d'oseille aussi, opportunément. L'occasion fait le larron. Mais dés qu'il est question d'un paquet d'oseille, vous pouvez être à peu prés sur que vous ne serez pas tout à fait seul sur le coup. L'argent c'est la boite de Pandore ! Du conflit garanti sur facture. Parole ! Et par un enchaînement improbable des événements, par un concours délirant des circonstances, nos trois amis vont tour à tour avoir à faire à : une nymphomane vénale, des emmerdes, un cow-boy philosophe, des emmerdes, la mort, des emmerdes, de la sodomie non-consentie, des emmerdes, un vieux rapiat d'handicapé, des emmerdes, des vendeurs de deuil sans scrupules, des emmerdes, et des sales nazis coupeurs de zézéttes encore. Entre autres emmerdes.
Mais je vous en laisse découvrir tout ça dans l'ordre les loulous. Vous serez pas déçus. C'est drôle et c'est tendre tout à la fois.
En tous cas c'est fou ce qu'il peut s'en passer des drôles de choses, sur cette machine ronde. Surtout quand on cherche juste à se la couler douce bien peinard, mollement, rien qu'à se siffler des russes blancs et de la chnouf au nom de tous.
Faut vraiment que ce soit une foutue planète !