The Bikeriders
6.6
The Bikeriders

Film de Jeff Nichols (2024)

Un film détonnant qui nous embarque dans l'histoire d'un club de motards des années 1960-1970, entre biopic et fiction. On y suit le jeune photographe Danny Lyon dans son travail pour capturer les moments de gloire mais aussi la déchéance des Vandals, entre interviews et clichés pris sur le vif (l'inspiration provient du livre de photos du véritable Danny Lyon, qui a documenté le quotidien d'un club de Chicago à la fin des 1960s).

C'est une belle impression d'authenticité qui se dégage alors du film, qui nous plonge dans l'atmosphère des 60s aux Etats-Unis et nous fait découvrir l'univers des bikers à travers des tenues cuir et jeans, une photographie léchée et une bande-son bien rock. On notera le soin apporté aux plans mettant au centre les motards, parfois directement repris et adaptés des photographies d'époque de Danny Lyon (lesquelles font d'ailleurs une apparition au générique de fin, sur la superbe chanson "Bikeriders" du groupe Lucero, elle aussi inspirée par le livre de photos éponyme).

Mais ce sentiment de sincérité et d'authenticité est aussi suscitée par l'histoire des Vandals elle-même, et surtout par la façon dont elle est racontée. A travers le travail du photographe mais aussi les témoignages des membres du club et de leurs proches (Jodie Comer délivre notamment une performance touchante mais tout en simplicité dans le rôle de Kathy), on se passionne pour le récit de vie des Vandals. On rit avec eux lors de leurs instants de bonheur, on s'amuse de leurs excès et leur mode de vie débridé, on s'émeut devant leur soif intense de liberté. Mais les parts plus sombres de leur existence ne sont pas passées sous silence, et on les désapprouve, on s'indigne, on s'inquiète, on souffre avec eux dans les épreuves.

On s'attache particulièrement à nos trois personnages principaux, entre amitié, amour et rivalité. D'abord Kathy, qui découvre par pur hasard l'univers des motards et adopte leur mode de vie par amour pour un des membres du club. Puis Johnny (joué par l'excellent Tom Hardy), chef du club craint et respecté, mais aussi figure d'autorité paternelle, protectrice et bienveillante. Et enfin Benny, étoile au cœur fou et brûlant, tête brûlée recelant aussi un côté sombre, ne vivant que pour la Bécanne, brillamment interprété par Austin Butler.

Alors que le club - initialement une communauté soudée et même une véritable famille pour cette bande bizarre de marginaux sympathiques - plonge peu à peu vers son déclin et dans un abîme de tragédie, entre accidents, rivalités et violence de gangs, drogues et criminalité, on assiste à un double duel. Celui de Kathy et Johnny pour gagner la dévotion de Benny, qui doit alors choisir entre son amour pour sa compagne et l'assurance d'une vie plus tranquille, et son admiration sans borne pour son leader et sa passion dévorante pour la moto (il finira par opter pour la 3ème voie, c'est-à-dire la fuite vers sa propre liberté dans une quête d'indépendance), le tout dans un jeu de dynamiques très intéressantes au sein d'une étrange trio, traité à la façon d'un triangle amoureux. Mais aussi celui de Johnny et The Kid (dont le rôle est tenu par un Toby Wallace à la fois inquiétant et magnétique, dont les traits ne sont pas sans rappeler ceux de Brad Pitt et Heath Ledger au même âge...), dans leur affrontement pour le contrôle du club, entre ancienne et jeune générations, entre code d'honneur et loi sanguinaire des gangs.

On assiste alors à la chute des Vandals qui se conclue sur la mort de Johnny et le retour de Benny auprès de Kathy pour une vie plus rangée. Mais, comme le laisse sous-entendre la scène finale, l'âme du club et le vent de la liberté continuent à vivre dans les cœurs de nos personnages, tout comme les souvenirs bons comme mauvais continueront de les hanter jusqu'à leur dernier souffle. Et alors que le générique commence à défiler au rythme des photos et des guitares, on sait qu'on se souviendra nous aussi de Benny, Kathy, Johnny, Zipco, Funny Sonny, Brucie, Wahoo, Cockroach, et tous les autres rois de la route.

EctoplasMan
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le 11 juil. 2024

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