Comme le film est réservé à ceux qui ont vu la série, il en sera de même pour la critique.
Je n'ai pas accroché à la série. Shinji et Asuka m'étaient insupportables, le ton mystique n'avait pas réussi à m'accrocher et les délires psychédéliques concernaient un personnage pour lequel j'avais peu d'intérêt. La fin de la série m'avait laissé froid, je suivais de loin les débats pour savoir si elle était géniale ou si c'était un fuck, si c'était la volonté du réalisateur ou si c'était la conséquence d'un manque d'argent bridant sa créativité. Et personne ne sait si cette nouvelle fin est légitime ou si c'est un boulet imposé au réalisateur.
Mais moi qui n'aimais pas à la série, j'ai été mis sur le derrière par ce film de fou furieux. Il paraît que Hideaki Anno n'en voulait pas, et que ça l'a rendu furax d'être obligé de le faire. Rien n'est moins sûr (Anno aurait dit l'inverse en interview), mais c'est largement plausible tant le film transpire la rage de la manière la plus violente possible. Il y a des images insoutenables et elles prennent un sens terrible avec cette interprétation, appuyée par ce plan d'un enfant qui bâtit une pyramide de sable avant de la détruire à coups de pieds. Mais comment savoir si Anno déteste réellement ce film ou s'il en fait un contre-pied à son double-épisode final ? Le mieux est de prendre ce film pour ce qu'il est, en parallèle de la série et non comme son annulation. Imaginons le comme une réalité alternative, une autre façon de voir la fin d'Evangelion avant Rebuild Evangelion, et laissons les fans décider de la fin qu'ils veulent retenir, de ce qui reflète le mieux leur vision d'Evangelion.
Et le moins qu'on puisse dire, c'est que cette fin là tranche avec la version psychanalytique qui m'avait autant laissé sur ma faim que s'il s'était agi d'un "c'était juste un rêve". La psychanalyse est toujours largement présente, mais si elle me reste assez hermétique elle est déjà moins confuse et indigeste dans sa présentation. Les questions posées n'ont toujours pas de réponse claire, mais je crois qu'il faut y renoncer à jamais et que ce n'est pas le but de la série. Et dans le cas présent ça ne m'a pas dérangé, ce déchaînement de violence et d'ésotérisme s'est montré tellement fort, tellement grandiloquent que j'en suis resté fasciné sans rien demander en retour. Il n'y a plus rien à comprendre, on assiste ici à la fin de tout, peut-être en métaphore de la destruction de l'oeuvre par son créateur Anno comme certains le suggèrent. Cela passe par une manifestation divine qui ferait passer la fin d'Akira pour un pet dans une église. C'est quelque chose qui n'a plus de sens cartésien, qui ne cherche plus à transmettre d'information intradiégétique, on est juste devant une décharge artistique écrasante. Quelque chose qui marque la rétine à tout jamais. Le tout sans oublier de mettre en valeur le doute de Shinji qui cherche à comprendre ce qu'il souhaite pour lui et pour les autres.
J'ai lu que The End of Evangelion était un film qui plairait à ceux qui n'aiment pas la série. Il se trouve que c'est mon cas, mais ce n'est pas réellement pour la présence de la bagarre (bien que ce fut réussi de ce côté là). Ce n'est pas non plus pour le délire otaku des gros monstres et des filles en combinaison, malgré un message qui passe par quelques images sexuelles un peu dérangeantes. Mon appréciation était purement liée à la puissance viscérale et grandiose de ses images. C'est une fin de série qui me dépasse mais qui m'a laissé essoufflé, pris de court. Comme beaucoup j'ai trouvé que Shinji y était vraiment pénible (mais je pense de même pendant le reste de la série). Mais ça valait le coup de suivre toute la série pour finir là-dessus.